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La Chair des tristes culs – Pierre Notte – Théâtre du Rond-Point

14 janvier 2013
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La Chair des tristes culs - Pierre Notte - Théâtre du Rond-Point

Soyons honnête, pour la chair, une pulpeuse copie de Brigitte Bardot à vingt ans s’allonge à n’en plus finir sur un transat à Saint-Tropez et se déhanche tout en sachant chanter. Mais côté masculin, on reste sur sa faim malgré les crêpes. Un jeune homme qui a envie de se suicider porte un pantalon trop court et serré en bas, les cheveux plaqués autour d’une raie de brave garçon, le pull col en V et sans manches, façon années soixante. Il a donc envie de se suicider. Ce qui permet des moments inventifs où il se met au sens propre la tête dans un sac. Mais le parti pris étant ici l’atmosphère des chansonniers d’un autre temps, on se contente de sourire. Heureusement, une jeune femme plus détachée que lui des misères humaines, s’évertue à régler l’opération proprement tandis qu’elle cherche joyeusement ses œufs et sa farine pour faire ses crêpes puis finalement, entre fantôme et créature réelle, le jeune homme renonce à son geste.

Le spectateur est invité à rentrer avec légèreté dans cette atmosphère où les noirceurs de la vie sont volontairement traitées en rose sur le mode de la bluette. Certes, les trois comédiens y rentrent aisément, souples dans leur jeu, malicieux, mais, malgré leur charme, ils passent sans surprises des dialogues à la mélodie. Déjà interprètes dans la pièce Sortir de sa mère proposée juste avant dans le même lieu, ils collent au rythme sans éclats de cette petite musique juvénile qui cherche à pas timides l’absurde tout en flirtant sans audaces avec les comédies musicales de Jacques Demy. Les convenances du genre y sont mélangées prudemment, la tonalité est au final implacablement coincée dans des couplets où l’on s’amuse à pianoter du bout du cœur sur des drames tirés par les petites ficelles d’un chassé-croisé stéréotypé où maman est belle et inaccessible à mourir tandis que papa est absent, le défunt s’avérant l’amant de la blonde façon BB, etc.

Au bout du compte, tout s’arrange, le suicide est raté, aucune limite n’est franchie ni dans le fond ni dans la forme. Le théâtre a ici une fonction qui consiste à tout rapetisser mais cela divertira celui qui s’ennuie jusque dans ses chagrins. Ou celui qui veut se souvenir sans peine de son adolescence tourmentée par la peur de la chair joyeuse. Au cabaret, tout finit par des chansons.

Isabelle Bournat

La chair des tristes culs

Pièce avec chanson de Pierre Notte

Mise en scène, musique et jeu de Pierre Notte

Avec Thiphaine Gentilleau, Brice Hillairet et Chloé Olivères

Jusqu’au 9 février 2013 à 21h
Le dimanche 18h30
Relàche les lundis et le 13 janvier

Tarifs : de 11 à 28 euros

Réservations par tél. : 01.44.95.98.21

Durée : 1h15

Théâtre du Rond-Point
2 bis avenue Franklin D.Roosevelt
75008 Paris
M° Franklin Roosevelt

www.theatredurondpoint.fr

A découvrir sur Artistik Rezo : 
– Sortir de sa mère, de Pierre Notte
(du 8 janvier au 9 février 2013) 
– Les pièces à voir à Paris en janvier 2013

[Visuel : La chair des tristes culs. © Stéphane Trapier]

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