Une Douce imprudence – Eric Lamoureux / Thierry Thieû Niang – Théâtre national de Chaillot
Une douce imprudence Poème chorégraphique de et par Éric Lamoureux et Thierry Thieû Niang Avec l’accompagnement de Héla Fattoumi Musique de Sidsel Endresen Conseil pour les lumières : Xavier Lazarini Avec Éric Lamoureux et Thierry Thieû Niang Du 25 au 28 mars 2014 Théâtre national de Chaillot |
Du 25 au 28 mars 2014
Deux hommes pour un pas de deux, sans que ni l’un ni l’autre ne tente de se tirer la couverture. Pourtant, ce ne sont pas les occasions qui manquent. Car justement, le sol en est couvert. Et nous découvrons comment, grâce à la fusion avec un corps en vrille, une couverture peut être une sculpture ! Une œuvre de maturité. Ancien athlète, Lamoureux aime mélanger danse et sports. Mais ici, il fait l’exact contraire, puisqu’il ralentit, apaise et se concentre sur une relation intimiste. Il sait par ailleurs très bien parler du passage d’un « corps performant » à un « corps poétique ». Mieux, le voici sur le plateau, revenant sur une amitié de vingt ans avec Thierry Thieû Niang, chorégraphe humaniste s’il en est, ayant récemment créé une version performative du Sacre du Printemps pour personnes âgées. Avec l’âge, vient la sagesse, l’apaisement, l’ouverture… On se met à l’écoute de soi-même et de l’autre. Eric Lamoureux et Thierry Thieû Niang expriment cette sérénité en jouant ouvertement avec leur part féminine, et en portant sur la danse un regard convoquant la sensualité et les arts plastiques. Aussi, leurs torses nus ou leurs têtes parfois voilées peuvent tout autant évoquer la mythologie grecque que l’insouciance enfantine. Deux hommes dans un studio, comme visités par la danse ou par leurs souvenirs. Cet espace protégé les accueille avec sérénité et complicité, comme pour une méditation ou une conversation à bâtons rompus. Quelle que soit leur intention initiale, ils se laissent prendre au jeu. Ils étalent des couvertures, les font vriller et les transforment en petites sculptures. Solides et chaudes, elles protègent et dévoilent leur beauté sculpturale. Jamais Lamoureux ne nous avait autant parlé du plasticien en lui. Curieuse sensation de suivre leurs pirouettes dansées au ralenti, alors que, paradoxalement, ces tourbillons évoquent tout ce qui tourne grâce à la vitesse. Car en effet, le vortex est la colonne vertébrale de cette « Douce imprudence ». Les couvertures vont aussi vêtir le corps tel la serviette de bain d’une femme ou encore, former d’énormes roulades autour de leurs têtes. Elles créent, structurent et révèlent les relations entre les danseurs. Rencontres, étreintes, roulades ou manipulation de l’autre ponctuent cette évocation d’un après-midi, qui fait aussi penser à Jérôme Robbins quand celui-ci revisite le Faune de Nijinski et sa charge érotique, ajoutent des moments de complicité tendue ou d’épuisement. Et la douceur chorégraphique de Lamoureux et Niang passe tel un songe. A la fin, les deux remettent leurs tenues de ville, s’assoient et philosophent en silence. Thomas Hahn
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