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Entretien avec Cathryn Boch, lauréate du prix Drawing Now 2014

7 avril 2014
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Entretien avec Cathryn Boch, lauréate du prix Drawing Now 2014

Le 7 avril 2015


Le quatrième prix Drawing Now a été attribué à Cathryn Boch pour son travail atypique sur papier, qu’elle coud, racle, déchire et recompose. Au détour du salon du dessin contemporain, Art Media Agency (AMA) s’est entretenu avec l’artiste présentée en focus par la galerie Claudine Papillon afin de recueillir ses impressions et de mieux comprendre sa démarche créative.

Qu’avez-vous ressenti à la remise de votre prix ?

En fait, je ne m’en suis pas vraiment rendu compte, car je travaille tout le temps. Quelles que soient les conditions, je ne m’arrête pas, car j’ai besoin d’être dans la matière pour calmer mon esprit qui est toujours en ébullition. Mais c’est certain, un prix est une reconnaissance. C’est particulier car souvent, on a du mal à me mettre dans un cadre.

Justement, vous travaillez votre papier en trois dimensions, à la machine à coudre. Pourquoi utiliser cette technique ? 

C’est une rencontre en deux temps, car j’envisage mon travail sur papier comme la greffe de quelque chose sur autre chose. La greffe est une contrainte qui joue sur deux territoires, deux éléments. Mon travail est assez organique. Par contre, il n’est pas méditatif. Au contraire, il est très exploratoire et physique.

D’où vous vient cette obsession de la couture ?

C’est un héritage familial, quelque part. Ma grand-mère était couturière et mon grand-père, dessinateur. J’ai toujours vu des fils, des machines à coudre dans mon enfance. Mais cela s’est révélé dans mon travail lors d’une résidence d’artiste en Lituanie. Je manquais de matériel pour dessiner, j’étais très frustrée et j’errai dans les rues de Vilnius. Soudain, je me suis rendu compte que la ville était peuplée de merceries, ce qui n’est finalement pas étonnant car il existe une ancienne tradition de broderie dans cette région. C’est comme ça que j’ai substitué les aquarelles et les gouaches que je ne trouvais pas.

Que signifie l’usage du fil dans votre travail ?

Je suis alsacienne, moitié française et moitié allemande. Cette double nationalité joue sur le fil justement. Ce n’est pas un hasard si j’ai commencé à utiliser du fil DMC qui est produit par une fabrique alsacienne. Mes premières œuvres étaient cousues à la main, pour ajouter de la texture à mes gouaches. Le résultat était assez moche, pour tout dire. Lorsque je suis passé à la machine à coudre, le papier faisait des bourrages, se déchirait, les aiguilles cassaient. J’ai persisté et c’est ainsi que j’ai évolué dans ma manière d’envisager le papier, non pas comme un support lisse, mais comme matière.

Pourtant, vous tenez au terme de dessin…

En effet, mais je ne peux pas me satisfaire de la surface. Lorsque je couds mes papiers, je travaille sur tous les plans, dedans, dehors, entre les fibres. Je le tords, je le perce, je le gratte. En le retournant, je découvre autre chose. Ce qui m’intéresse, c’est cette notion d’entre deux, que l’on retrouve dans la peau, la frontière, la tension.  Si je suis attachée au terme dessin, c’est parce qu’il est un fil direct avec la pensée et qu’il n’est jamais fini. On ne le lâche jamais, c’est une proposition en devenir avec ses repentirs. Le dessin est vivant malgré soi.  En fait, j’aimerais beaucoup les exposer comme des sculptures même si c’est techniquement compliqué à mettre en œuvre.

Quelles sont vos relations avec vos collectionneurs ?

C’est une véritable relation d’intimité car, justement, le collectionneur est le seul à connaitre totalement l’œuvre, à la retourner, à savoir que ce qui se passe derrière. Il comprend aussi que ce qui se passe à l’envers est tout aussi important que ce qui se passe devant.

En dehors de Drawing Now, quels sont vos projets d’exposition ?

En ce moment, je suis en pleine transition, je viens de m’installer à Marseille. Mais en novembre prochain, j’expose à la galerie Sébastien Bertrand à Genève. Je vais également faire l’accrochage de deux grands formats acquis par le Frac Picardie en septembre dernier (ndlr : Fonds régional d’art contemporain spécialisé dans le dessin). Sinon, j’ai cinq œuvres qui ont été présentées lors de l’exposition « Donation Florence et Daniel Guerlain » à Beaubourg. D’ailleurs, le musée national d’art moderne m’a achetée une œuvre pour ses collections permanentes.

Art Media Agency

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