Bertrand Bonello – Résonances : exposition au Centre Pompidou

Pendant cinq semaines, le Centre Pompidou laisse les clés de son niveau -1 au cinéaste Bertrand Bonello. Autour d’une exposition exceptionnelle sur la relation entre musique et cinéma, Bertrand Bonello revient sur son parcours, les films du passé, ceux qui ne se sont jamais faits (les films fantômes) et sa passion pour le son et la musique.

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C’est un espace avec plusieurs écrans au centre duquel trône une voiture accidentée. Il y a l’installation Remix qui revisite sept œuvres de l’artiste, longs et courts métrages. Ensemble, ils deviennent un tout, les sons se confondent. Pour augmenter l’effet d’harmonie et d’unité, le réalisateur a composé une musique originale.

Il y a aussi les films fantômes. Deux projets de films avortés, Madeleine d’entre les morts et La Mort de Laurie Markovitch, que l’exposition fait vivre au travers de photos, de scènes tournées presque par hasard, des voix de Louis Garrel, Kate Moran, Mathieu Amalric et Clothilde Hesme. En parallèle à cette expérience de cinéma, l’éditeur Prairies Ordinaires propose le regroupement des scénarios de ces films fantômes dans un livre sobrement intitulé Films fantômes.

Le Centre Pompidou a aussi commandé au cinéaste un film de 17 minutes intitulé Où en êtes-vous Bertrand Bonello ? Le court métrage est à l’image de l’exposition, à la fois tourné sur le passé et vers le futur. On y retrouve un Bertrand Bonello intime (le film est construit comme une lettre puis un dialogue avec sa fille), mélancolique mais résigné. Ce court métrage inédit est disponible sur le site d’Arte.

Le travail le plus étonnant est celui qui a été fait autour de Brumes d’automne. Sur la base d’un film muet en noir et blanc de 1928, le cinéaste a invité deux artistes, Richie Hawtin et Diana Soh, à composer une musique originale. Bertrand Bonello lui-même a proposé une quatrième composition, et la musique originale composée par Paul Devred est aussi présentée. Sous la forme de 4 x 12 minutes de film, les images se répètent mais les ambiances et les sons, l’interprétation même de l’ensemble, changent. Le poème visuel, les feuilles d’automne, la boue et l’eau, le regard hypnotique de Nadia Sibirskaïa prennent d’autres teintes, une autre force, et répondent on ne peut plus parfaitement à la problématique de la relation entre musique et cinéma.

Une dernière partie de cette exposition présente les compositions obliques, deux films musicaux et ludiques, My new picture et Stratégies obliques.

L’exposition donnera lieu à une masterclass, la projection des films du cinéaste en rétrospective, et une dédicace de son livre Films fantômes. Lors de la soirée d’ouverture, nous avons eu le plaisir de voir sur scène Musique et Voix, la chanteuse et comédienne Ingrid Caven a chanté le journal (en l’occurence Le Monde diplomatique du jour) et Blue Liz sur une musique de Bertrand Bonello, assis à son bureau devant son ordinateur, sur la scène.

Octobre 2014, c’est la rentrée de Bertrand Bonello : une exposition au Centre Pompidou qui rend réellement hommage à la complexité de son œuvre et de son parcours, un livre et un nouveau film dans les salles (qui a déjà été choisi pour représenter la France aux Oscars 2015). Celui qui a longtemps été confidentiel et incompris est actuellement en train de recevoir la reconnaissance qu’il mérite, pas forcément celle du grand public (même si on peut espérer que Saint Laurent soit un beau succès) mais celle plus chaleureuse de ceux qui sont prêts à s’oublier dans une œuvre riche et multiple, personnelle et parfois glaçante. L’univers inimitable de Bertrand Bonello.

Lucile Bellan

[Visuel © Centre Pompidou]