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Salle n°6 – Tchekhov

13 mai 2010
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Et pour cause : celui-ci est composé en partie d’interviews frontales, réalisées avec toute la distance et la neutralité du documentaire, entre lenteurs et vides à l’image de l’existence véhiculée dans le film. Tourné dans un véritable asile, le cinéaste y mêle d’ailleurs les malades à ses acteurs.


Le scénario retrace la chute de l’un des psychiatres de l’hôpital : Andréï Iéfimytch. Découragé par le non sens de la vie, le vide intellectuel et culturel qui règne dans sa province russe, il sombre peu à peu dans la dépression. Résigné par son mépris de la souffrance et de la futilité de la vie, il trouve pour seule consolation ses discussions avec l’un des fous de la salle n°6 : Ivan Dmitrich, seul être paradoxalement capable de lui apporter un discours réfléchi.


De leurs échanges vont rejaillir des questions récurrentes : la liberté, l’immortalité, l’ennui et l’absurdité qu’il y a à vivre. C’est finalement le médecin qui se retrouve à attendre des réponses de son patient et finira par être lui aussi interné, ce qui nous amène peut-être au véritable sujet du film : la frontière entre raison et folie ; une ligne que Shakhnazarov montre comme extrêmement mince et basculant sans cesse d’un côté vers l’autre. Il n’existe d’ailleurs pas de grand moment de démence chez les fous : on les voit tenir des propos rationnels à leur sujet à l’entrée du film tandis qu’à l’inverse celui-ci se termine sur la crise de folie plutôt inquiétante de la nièce « saine » du docteur.


Il n’y a pas de place pour l’emphase, l’horreur, pas de pathos ni même de fascination pour la folie et c’est cette grande simplicité qui fait l’intérêt du film. On observe, on tente d’analyser un message incertain et qui semble nous montrer que plus on est rationnel vis-à-vis des choses de la vie et plus consterné on se condamne finalement à sombrer vers la folie. Si l’aspect existentialiste est le point fort du film, le reproche qui s’impose va lui  à son aspect critique : des questions politiques semblent vouloir émerger mais restent silencieuses, à peine sous-entendues : corruption, absurdité de la société, procès des asiles et de leurs mauvaises conditions  (hygiène, maltraitance, diagnostiques absurdes, enfermement…)


On attend peut-être des engagements plus virulents mais tout est fait dans la timidité et la distanciation pour laisser le spectateur libre d’interprétation : on donne le minimum pour finalement plonger vers un nombre incalculable de questions à méditer…


Amandine Joannès



Salle n°6 – Tchekhov

Un film de Karen Shakhnazarov
Avec : Alekseï Vertkov, Vladimir Iline, Alekseï Jarkov

 

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Sortie le 5 mai 2010

 

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