0 Shares 2649 Views

Ma Belle gosse – comédie dramatique de Shalimar Preuss

10 septembre 2013
2649 Vues
Ma Belle gosse - comédie dramatique de Shalimar Preuss

Maden a 17 ans. Cet âge ingrat de l’adolescence où l’on fait tous des conneries comme le lui dit si justement son père. Pas franchement frondeuse, elle a plutôt tendance à s’enfermer, s’isoler dans l’hypothétique attente d’un courrier du prisonnier avec lequel elle entretient en cachette une correspondance et qu’elle espère rencontrer sur cette île de Ré elle passe ses vacances à quelques encablures de la prison il est détenu.

Le fil conducteur sera l’isolement, dont la cinéaste va filer la métaphore tout au long de son propos. Son premier long métrage joue en effet cette partition, tant dans le choix du décor (l’exigüité d’une île) que dans le filmage de son personnage principal. Maden, à laquelle la jeune Lou Aziosmanoff donne à la fois beaucoup de vie et de mystère, ne cesse d’ériger des murs autour d’elle, de s’enfermer dans son secret comme pour être à la fois plus proche de son étrange compagnon épistolaire et pour se préserver des coups de cette vie adulte qui s’ouvre à elle, même si elle n’y a pas encore vraiment de légitimité (ainsi que l’exprime avec un cruel réalisme la séquence dans la prison).

Mais rien n’est jamais systématisé, pas plus ce thème récurant que ce qui forge l’ossature dramaturgique du sujet. C’est en fait avec un souci de réalisme, pour ne pas dire de naturalisme, que la cinéaste filme ses protagonistes, les laissant souvent livrés à eux-mêmes (ou supposés comme tels…). Avec une infinie économie de moyens et de mots (peu de choses vraiment importantes sont dites, comme dans la vie de tous les jours en somme…), les personnages nous laissent entrer dans leur histoire. Le pouvoir de l’image joue à plein régime. Plus dans la suggestion que la démonstration, la scénariste divulgue par touches quasi pointillistes ce qui constitue la trame de son récit mais comme si au fond l’essentiel était ailleurs. A l’inverse de Sandrine Veysset dans « Y’aura-t-il de la neige à Noël » dont tout l’enjeu se définit dans l’ultime séquence, Shalimar Preuss, en divulguant par doses homéopathiques ses éléments narratifs, (ré)amorce sans cesse l’intérêt du spectateur. Une tension crescendo se fait rapidement sentir, les paysages n’ayant d’idyllique que le nom.

Un travail remarquable est d’ailleurs fait sur le son qui distille son lot d’inquiétudes diffuses (le vent, le ressac des vagues, les bruits de la maison) autant que les regards, les non-dits, les messages sibyllins. Fortement aidée par une équipe artistique solide (Jocelyn Lagarrigue en tête dans le rôle du père), la cinéaste capte avec acuité cet âge transitoire, jouant sans cesse sur la corde raide, laissant faussement tomber son spectateur pour mieux le rediriger au gré de sa narration. Une déambulation qui finit par nous être familière, à l’instar de tous ces personnages pas si éloignés que ça de nos quotidiens.

Franck Bortelle

[embedyt] https://www.youtube.com/watch?v=up6MgFiCqos[/embedyt]

Ma belle gosse

De Shalimar Preuss

Avec Lou Aziosmanoff, Jocelyn Lagarrigue et Victor Laforge

Durée : 80 min.

Sortie le 11 septembre 2013

A découvrir sur Artistik Rezo :
– les films à voir en 2013

Articles liés

“Du rêve que fut ma vie”, un spectacle de Camille Trouvé et Brice Berthoud au Théâtre 14
Agenda
84 vues

“Du rêve que fut ma vie”, un spectacle de Camille Trouvé et Brice Berthoud au Théâtre 14

Femme, artiste, muse et rebelle. Nous n’en avions pas fini avec Camille Claudel. Après “Les Mains de Camille”, spectacle qui explore l’enfance de l’artiste, les liens avec sa famille et ses contemporains, “Les Anges au Plafond” plongent dans la...

“Oh My Gods !” : L’exposition divine de Wen Na dès le 6 juin au Musée en Herbe !
Agenda
91 vues

“Oh My Gods !” : L’exposition divine de Wen Na dès le 6 juin au Musée en Herbe !

Dans le cadre des soixante ans de l’amitié franco-chinoise, la talentueuse artiste chinoise, Wen Na, investit le Musée en Herbe de fresques et de sculptures pour sa nouvelle exposition “Oh My Gods !”. Entre mythologie et divinités, l’artiste est...

Ne manquez pas la 15e édition du Point Virgule Fait l’Olympia le 19 juin !
Agenda
88 vues

Ne manquez pas la 15e édition du Point Virgule Fait l’Olympia le 19 juin !

Pour la 15e fois, la plus petite des grandes salles parisiennes investit la salle mythique de l’Olympia avec toujours le même plaisir de vous livrer la meilleure sélection des humoristes, les plus drôles de leur génération. Plus de 40...