0 Shares 1546 Views

Salle n°6 – Tchekhov

13 mai 2010
1546 Vues
la-salle-n-6-tchekov

la-salle-n-6-tchekov::

 

Et pour cause : celui-ci est composé en partie d’interviews frontales, réalisées avec toute la distance et la neutralité du documentaire, entre lenteurs et vides à l’image de l’existence véhiculée dans le film. Tourné dans un véritable asile, le cinéaste y mêle d’ailleurs les malades à ses acteurs.


Le scénario retrace la chute de l’un des psychiatres de l’hôpital : Andréï Iéfimytch. Découragé par le non sens de la vie, le vide intellectuel et culturel qui règne dans sa province russe, il sombre peu à peu dans la dépression. Résigné par son mépris de la souffrance et de la futilité de la vie, il trouve pour seule consolation ses discussions avec l’un des fous de la salle n°6 : Ivan Dmitrich, seul être paradoxalement capable de lui apporter un discours réfléchi.


De leurs échanges vont rejaillir des questions récurrentes : la liberté, l’immortalité, l’ennui et l’absurdité qu’il y a à vivre. C’est finalement le médecin qui se retrouve à attendre des réponses de son patient et finira par être lui aussi interné, ce qui nous amène peut-être au véritable sujet du film : la frontière entre raison et folie ; une ligne que Shakhnazarov montre comme extrêmement mince et basculant sans cesse d’un côté vers l’autre. Il n’existe d’ailleurs pas de grand moment de démence chez les fous : on les voit tenir des propos rationnels à leur sujet à l’entrée du film tandis qu’à l’inverse celui-ci se termine sur la crise de folie plutôt inquiétante de la nièce « saine » du docteur.


Il n’y a pas de place pour l’emphase, l’horreur, pas de pathos ni même de fascination pour la folie et c’est cette grande simplicité qui fait l’intérêt du film. On observe, on tente d’analyser un message incertain et qui semble nous montrer que plus on est rationnel vis-à-vis des choses de la vie et plus consterné on se condamne finalement à sombrer vers la folie. Si l’aspect existentialiste est le point fort du film, le reproche qui s’impose va lui  à son aspect critique : des questions politiques semblent vouloir émerger mais restent silencieuses, à peine sous-entendues : corruption, absurdité de la société, procès des asiles et de leurs mauvaises conditions  (hygiène, maltraitance, diagnostiques absurdes, enfermement…)


On attend peut-être des engagements plus virulents mais tout est fait dans la timidité et la distanciation pour laisser le spectateur libre d’interprétation : on donne le minimum pour finalement plonger vers un nombre incalculable de questions à méditer…


Amandine Joannès



Salle n°6 – Tchekhov

Un film de Karen Shakhnazarov
Avec : Alekseï Vertkov, Vladimir Iline, Alekseï Jarkov

 

{dmotion}xd3tum{/dmotion}

 

Sortie le 5 mai 2010

 

Articles liés

Marine + bgl en concert aux Trois Baudets le 12 avril
Agenda
95 vues

Marine + bgl en concert aux Trois Baudets le 12 avril

Ce duo tente à saisir une émotion forte. Entre jeu de musicien.ne.s et jeu d’acteur.rice.s, ces deux artistes proposent un concert sans équivaut.  Marine  Dans son univers léger et mélancolique à la fois, Marine évoque ses doutes, ses peines...

Dany Parmentier dans “Gourou” au Petit Palais des Glaces
Agenda
112 vues

Dany Parmentier dans “Gourou” au Petit Palais des Glaces

Une expérience hilarante à la frontière du stand-up et du show de développement personnel. Vous l’avez sans doute découvert en tant que Philippe Risotto avec Airnadette, venez faire la connaissance du Gourou Dany Parmentier dans un spectacle hilarant qui...

Une comédie de remarriage : l’avant-première “Les tortues” au CWB
Agenda
102 vues

Une comédie de remarriage : l’avant-première “Les tortues” au CWB

“Les Tortues est le film que j’aurais aimé voir pendant mon adolescence, lorsque je cherchais frénétiquement des modèles et des couples auxquels je pouvais m’identifier. Dans les années 80, les rares personnages queer à l’écran connaissaient des destins tragiques...