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Entre deux notes, Galván recompose le flamenco

31 janvier 2016
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Israel-Galvan-Jerez

FLA.CO.MEN

D’Israel Galván

Avec Israel Galván

Musiciens:
David Lagos, Tomás de Perrate, Eloisa Canton, Caracafe, Proyecto Lorca (Juan Jimenez Alba & Antonio Moreno)

Du 3 au 11 février 2016

Tarifs: 26€-35€

Réservation: 01.42.74.22.77

Théâtre de la Ville
2 Place du Châtelet
75004 Paris
M° Châtelet

www.theatredelaville-paris.com

HugoGumiel MG 6014FLA.CO.MEN – au Théâtre de la Ville, le nouveau spectacle d’Israel Galván retourne le flamenco comme un gant. La star de Séville danse en solo et revient à une épure totale, faisant entrer le dialogue entre danse et musique dans une dimension nouvelle. Plus aucune habitude ne tient, le chorégraphe remixe l’ensemble des ingrédients du genre. Est annoncé « un concert d’Israel Galván »! Ce n’est donc pas une pièce de danse? Voyons…

HugoGumiel MG 5985 1FLA.CO.MEN : Où la danse ne suit pas la musique, mais en devient le moteur. Où le corps du danseur n’est pas seulement un instrument, mais le chef d’orchestre, si ce n’est le compositeur. Où Galván ne se contente pas de livrer un spectacle, mais nous convie dans son laboratoire, comme pour suivre son processus de recherche en direct. FLA.CO.MEN  est peut-être le making of d’un spectacle en perpétuel devenir, le pouls de l’évolution de l’arte flamenca, pris en flagrant délice.

On pouvait voir en lui un Picasso du flamenco qui n’en faisait qu’à sa tête, voire à son corps, introduisant une géométrie nouvelle dans cet art passionnel. Mais ce n’était qu’un début. Aujourd’hui, Galván revisite la philosophie fondamentale de sa propre tradition. Il en questionne les symboles et les fétiches, les us et les coutumes. Et il n’a pas peur d’enfiler une robe à pois pour symboliser une féminité dont il incarne l’opposé.

[embedyt] https://www.youtube.com/watch?v=_b1F_IfzNMY[/embedyt]

 

FLA.CO.MEN ne se contente pas de recomposer le geste chorégraphique sur des registres musicaux hors du champ andalou traditionnel. Depuis longtemps, Galván secoue les idées reçues sur le genre. C’était déjà beaucoup, voire révolutionnaire, de danser dans un cercueil, d’inviter sur un plateau de flamenco du rock métal ou de la musique contemporaine expérimentale. Et voilà que Galván voit plus large encore, passe la vitesse supérieure et brouille toutes les pistes.

HugoGumiel MG 5421FLA.CO.MEN redéfinit intégralement la relation entre le flamenco et la musique, quel qu’en soit le genre. Galván subvertit l’idée même qui veut qu’on danse sur une musique et que ce dialogue crée une œuvre. Il se libère de ce postulat, non pour le nier à tout jamais, mais pour expérimenter toutes autres possibilités et y revenir plus frais que jamais. Car toutes ses diversions disent surtout une chose : Le geste musical et le geste chorégraphique avancent main dans la main, même si cela passe par les soubresauts et péripéties les plus inattendus.

Ici, le danseur aux bras et aux jambes à la Giacometti ne danse pas sur la musique, mais crée la musique en dansant. Serrant une chaussure de flamenco entre ses jambes, il la transforme en instrument. Face à un pupitre, il tourne les pages et en tire sa partition chorégraphique. Son corps est caisson, son zapateado du pied représente les palmas des musiciens, le mouvement de son buste devient le chant profond.

HugoGumiel MG 6119 1Le corps de Galván n’incarne rien de moins que la branche freejazz du flamenco. La recomposition du nom dans titre est bien plus qu’une anagramme innocente, plus qu’un jeu de mots. L’inversion symbolise à quel point Galván entend revisiter les fondements mêmes et secouer le bocal de la tradition. S’il reste le Picasso de son art, il passe de la peinture au collage. Dans El Final de este estado de cosas, son chef-d’œuvre à l’énergie dévastatrice, autant que dans Lo Réal, il n’était pas sorcier de déceler une référence à Guernica de Picasso. Prenons comme référence un collage de Picasso comme Guitare et bouteille de Bass, et l’esprit novateur de FLA.CO.MEN  devient évident. Un peu plus d’un siècle séparent les collages de Galván de ceux du peintre. Mais Picasso devint Parisien, alors que rien n’arrachera Galván à Séville. C’est Galván qui fait de sa ville un carrefour artistique mondial.

Thomas Hahn

[ Photos: Hugo Gumiel]

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