Le Bourgeois Gentilhomme en Avignon, par l’Agence du Voyage imaginaire

Si l’Agence du Voyage imaginaire est née en 2007, on connait déjà les marseillais de cette compagnie atypique qui nous ont fait rêver deux décennies durant avec le Cartoun Sardines Théâtre. Le groupe ayant splitté, on aurait pu craindre pour la magie particulière de leurs créations, mais Le Bourgeois Gentilhomme témoigne d’une faculté de créer dans la même veine féérique, et bien au-delà du schisme.  Le Cartoun Sardines Théâtre n’a donc pas dit son dernier mot, et nous en promet de bien jolis maintenant qu’il est devenu l’Agence du Voyage imaginaire.

Monsieur Jourdain a toujours plu et touché avec son ridicule naïf, et sa souffrance qu’il éprouve dans la conscience de ses carences esthétiques.  Peinture du vice et de l’ignorance dans la bourgeoisie naissante, cette pièce est un bijou de comédie où l’on pense le jeu des apparences en brouillant les pistes, en nous égarant entre le réel et  le superficiel, entre la sincérité et l’artifice. Ainsi, on comprend sans mal que la compagnie de Philippe Car, compagnie qui amuse en dérangeant et en accouplant les genres, ait opté pour l’adaptation d’une farce aussi riche en illusions et désillusions.

Au cœur de la scène est un dohyo, ring de sumo dans lequel tout peut prendre vie, et surtout le théâtre, à rideau découvert. Les accessoires, instruments, marionnettes et comédiens sont à cour, à jardin et dans le fond de scène, attendant d’être employés selon que les interprètes aient à émerveiller nos oreilles de leurs mélodies ou nos yeux de leur inventivité plastique.

Seuls Jourdain et les deux jeunes premiers sont incarnés par des acteurs en corps tandis que tous les autres rôles reviennent aux marionnettes que manipulent des comédiens vêtus de noir, relayés au délicat statut d’ombres pour les laisser vivre. Le parti pris est osé mais la cohabitation du vivant et de l’objet aboutit à merveille, et l’on s’habitue jusqu’à trouver complètement naturel qu’une marionnette plus ou moins étrange donne la réplique à un acteur.

Madame Jourdain est une poupée japonaise enveloppée de costumes traditionnels, en rupture avec un Dorante dont on a fait un robot télécommandé. Les interprètes et créateurs auraient fait un voyage inspirant à Tokyo avant de se lancer dans l’aventure…  Et bien l’on peut dire qu’ils ne perdent pas leur temps en voyage, car on est soufflé par l’intelligence avec laquelle la compagnie a intégré et assumé des influences japonisantes à la scénographie de son Bourgeois Gentilhomme.  Oscillant entre respect de la tradition et ultra-modernité, mais encore entre fragrances japonaises et langue de Molière, la compagnie de Philippe Car déplace les situations et détourne les usages jusqu’à parvenir à la démonstration d’un Bourgeois Gentilhomme universel en plus d’être atemporel.

Si le malin détour par la fantasmagorie burlesque agrée le rire, il permet également de verser dans  l’exaltation d’une satire bourgeoise qui, extraite de tout contexte, acquiert une essentielle valeur d’éternité.  Alors, oui ! Le message est là : le bonheur et le savoir ne s’achètent pas. Il n’en demeure pas moins qu’un ticket pour cette truculente comédie est un bon pour un moment de savoir, de ravissement, et de diablerie. Un régal pour petits et grands !

Christine Sanchez

Le Bourgeois Gentilhomme
Adaptation : Yves Fravega, Philippe Car
Mise en scène : Philippe Car, assisté de Laurence Bournet
Avec Valérie Bournet, Philippe Car, Nicolas Delorme, Claire Leyat, Vincent Trouble
Crédits photos : Elian Bachini

Du 5 au 24 juillet à 21 heures

Réservations au 04 90 26 07 40

Tarif: de

Villeneuve en Scène – Théâtre en itinérance
Place Charles David
30400 Villeneuve Lez Avignon

s’y rendre en voiture depuis Avignon :
Traverser le pont Daladier depuis la porte de l’Oulle, au bout du pont à droite, suivre Villeneuve Centre, au premier rond-point continuer tout droit sur trois cents mètres, se garer sur le parking à droite…

s’y rendre en bus depuis Avignon :
– Bustival départ Avignon Poste ou Avignon Porte de l’Oulle
(en service tous les dimanches et jours y compris jours fériés du 5 au 31 juillet)
– Ligne 11 (du lundi au samedi)
– Ligne 70 (le dimanche)