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Trois Tangos, d’Alfredo Arias, au Théâtre du Rond-Point

16 décembre 2009
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TANGOS_6_TATOUAGE

 

 

Un triptyque amoureux


Le premier tableau se passe dans les années 1930 à Buenos Aires. Les trois acteurs-chanteurs-danseurs s’expriment en espagnol. L’intrigue est racontée aux spectateurs par un vieil homme endimanché : tout le monde suivra cette histoire de jalousie et de meurtre passionnel. Tout de suite, on est frappé par la qualité du jeu des trois acteurs, qui parviennent à faire passer au public plus que l’essentiel de leurs émotions, sans pour autant parler leur langue. Le langage du corps, les intonations, les jeux de regard sont utilisés au mieux pour faire de ce spectacle un moment extrêmement expressif.

 

Le second tableau voit les acteurs transportés sur un paquebot en route pour Rio dans les années 1950. Les chants sont en Italien, le surréalisme s’invite à la fête par l’intermédiaire d’un homme-poisson bien malheureux. L’atmosphère change légèrement par rapport au premier tableau : un humour noir et décalé se fait plus marqué, alors que le crime reste au coeur des relations de ce triangle amoureux. Sur des airs de mandoline, les personnages se trompent, se mentent, s’aiment et deviennent des prédateurs inattendus les uns pour les autres.

 

Le dernier tableau transporte le public à Paris, rue de la Contrescarpe, en plein Quartier Latin, dans les années 1970. La musique suit le mouvement : elle devient pop, inspirée des Beatles et des Bee Gees, alors que les personnages masculins, les jumeaux Bruno et Bruna, sont vêtus de T-shirts évoquant les carrés de couleurs primaires de Mondrian. L’humour noir est ici complètement assumé : le personnage féminin, cantatrice de son état, déambule sur la scène vêtue d’une toque en forme de rat, l’un des jumeaux joue avec délectation et autodérision de sa bisexualité, participant d’une confusion des genres qui ravit le public. L’homicide final – et attendu, alors que le scénario se répète au fur et à mesure des tableaux – devient double meurtre, ce que laissait présager le thème des jumeaux. La femme, victime de sa propre roublardise, reste seule sur scène avec ses rats. Non contents de lui orner le chef, ils forment une étole qui lui couvre fièrement la poitrine.

 

 

De l’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace !


Les trois tableaux ont une identité propre, alors que leurs intrigues s’entremêlent et se confondent presque. On regrettera peut-être l’absence d’originalité dans les thèmes abordés : si leur traitement artistique est intéressant, notamment dans l’évolution chronologique marquée par les influences musicales utilisées, les scénarios reprennent les poncifs du genre sans vraiment tenter de les dépasser. La femme reste cette figure fatale et vénéneuse, synonyme de mort pour les hommes qui la côtoient, telle une mante religieuse toute de noir vêtue.

 

 

Arias convoque ainsi un imaginaire bien connu du spectateur, mais il semble ne pas vouloir faire l’effort d’aller au-delà de ces clichés liés aux histoires de triangles amoureux et de vengeance passionnée. C’est fort dommage, car l’audace de certaines trouvailles artistiques, comme le thème des masques dans le troisième tableau ou encore la métamorphose du mari en poisson-volant dans le second, lui donnait cette licence de jouer avec les codes, de proposer quelque chose de plus impertinent, de plus subversif même.

 

 

Avec ses Trois Tangos, Alfredo Arias revisite le roman noir et ses thèmes récurrents, sur des mélodies qui partent du tango pour explorer des univers musicaux plus inattendus. Le spectacle mélange les genres : musique, danse, chant et comédie se fondent pour ne faire plus qu’un, pour former selon Alfredo Arias, « trois opéras pop ». Si ce parti pris artistique est une belle trouvaille, il souffre d’un scénario sans grande originalité ce qui est d’autant plus dommage que l’oeuvre se prêtait à cette audace.

 

Audrey Chaix

 

 

Trois Tangos
Mise en scène : Alfredo Arias
Livret : Gonzalo Demaria et Alfredo Arias
Création musicale : Axel Krygier
Avec Carlos Casella, Marcos Montes et Alejandra Radano
Intermèdes dansés : Jorge Rodriguez, Maria Filali

Durée : 1h20

 

Jusqu’au 16 janvier 2010

Du mardi au samedi : 18h30
Le 31 décembre à 15h30
Relâches le 25 décembre, les 1er et 2 janvier

Réservations : 01 44 95 98 21

 

Tarif plein, 28€. Groupe (8 personnes et plus), 20€. Plus de 60 ans, 24€. Demandeurs d’emploi, 16€. Moins de 30 ans, 14€. Carte ImaginR, 10€.

 

Théâtre du Rond-Point
2 bis, avenue Franklin D. Roosevelt
75008 Paris
Métro Franklin D. Roosevelt ou Champs-Élysées Clemenceau

 

www.theatredurondpoint.fr

 

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