Un Pourceaugnac explosif aux Bouffes du Nord
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Monsieur de Pourceaugnac De Molière Mise en scène de Clément Hervieu-Léger Avec Erwin Aros, Clémence Boué, Cyril Constanzo, Claire Debono, Stéphane Facco, Matthieu Lécroart, Juliette Léger, Gilles Privat, Guillaume Ravoire, Daniel San Pedro et Alain Trétout Jusqu’au 9 juillet 2016 Du mardi au samedi à 20h30, matinées les samedis à 15h30 Tarifs : de 16 à 38 € Réservation en ligne Durée : 1h45 Théâtre des Bouffes du Nord M° La Chapelle |
Quel joyeux mélange ! Amoureux de théâtre et de musique, Clément Hervieu-Léger a choisi de monter la comédie de Molière en musique avec la collaboration de William Christie et de ses musiciens des Arts Florissants presque telle qu’elle était montée par Molière et Lully devant Louis XIV. Dans un décor parisien des années 50, comédiens, chanteurs et musiciens se partagent avec une énergie explosive le beau théâtre des Bouffes du Nord pour nous régaler avec cette farce cruelle. Pour tous les âges.
Au XVIIe siècle, les jeunes filles étaient présentées à leur futur époux sans qu’elles soient forcément d’accord. La jeune Julie ne veut pas en faire les frais, tout amoureuse du jeune Eraste et ayant eu connaissance de l’arrivée à Paris de Monsieur de Pourceaugnac, un provincial débarquant de Limoges, mais suffisamment nanti pour satisfaire Oronte, le père de Julie. Le Napolitain Sbrigani et Nérine se feront donc les intermédiaires démoniaques pour renvoyer le gentilhomme dans le Limousin avant même qu’il ne puisse fréquenter Julie. De faux médecins le feront passer pour fou, de faux marchands flamands feront de lui un gangster recherché et de fausses maîtresses picardes l’accuseront de manipulation conjugale ! Autant de farces, de mensonges et de scénarios bouffons dont Molière s’amuse en ridiculisant comme il se doit les médecins de l’époque, les faux nobles et les bourgeois mariant leurs filles pour s’assurer une fortune. C’est Lully, le musicien du roi Louis XIV, qui jouait le faux médecin tandis que Molière improvisa en un mois cette folle comédie. Clément Hervieu-Léger, comédien et metteur en scène dont on a pu voir récemment le très beau Misanthrope à la Comédie-Française, crée le spectacle avec des chanteurs et des musiciens dans un décor d’immeubles parisiens et des costumes années 50, ce qui donne un plateau fourmillant d’idées et effervescent d’énergie. Les comédiens, souvent doublés ou accompagnés par les chanteurs, dialoguent devant les musiciens qui prennent aussi part au jeu, à la danse ou à la course poursuite. On a donc une voiture qui fait des embardées, un cycliste qui trace, des déguisements invraisemblables pour faire des farces tragiques au héros dans une atmosphère de trépidation rythmique sans une seconde de répit. Musique baroque, intermèdes précieux comme de petits diamants, invectives en patois picard ou flamand tissent le tissu d’une représentation baroque et bigarrée. Entre les facéties de Daniel San Pedro, irrésistible et scapinesque Sbrigani, et de Clémence Boué en Nérine délurée, la belle présence d’Alain Trétout en Oronte impose un jeu plus grave et Gilles Privat, dans une incarnation d’une simplicité et d’une économie bouleversantes, donne au personnage principal une lumineuse humanité. Justement parce que, contrairement aux autres personnages qui en font beaucoup sur scène, il n’accuse pas le trait du ridicule ou du grotesque de ce provincial empoté et naïf. Son personnage traverse la pièce semée d’embûches avec la grâce d’un funambule pris au piège de son propre rêve, dans une folie qui ne lui appartient pas mais dont il ne tarde pas à endosser les oripeaux. Malheureux, tragique et terriblement seul, il repartira la queue basse dans sa campagne limousine, ne comprenant toujours pas ce qui lui est arrivé. C’est magnifique. Hélène Kuttner [Photos © Brigitte Enguerand] |
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Une méchante farce
Un prétexte génial pour divertir
Gilles Privat en clown poète



