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Charles Mingus, une résurrection inattendue

Louise Hodé 8 décembre 2018
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Photo by Sue Mingus

Charles Mingus, jazzman américain, est connu par la contribution qu’il a apportée au jazz. Grâce à une trouvaille posthume, DJ et collectionneur Amir Abdullah vient de sortir un album exceptionnel. Une pépite !

Charles Mingus, né pour briller

Né le 22 avril 1922, Charles Mingus commence sa vie dans un foyer qui, sous l’autorité de sa belle-mère, n’autorise que la musique d’église. Mais Mingus développe très rapidement une passion pour la musique de jazz, notamment grâce à Duke Ellington, donc il écoute et analyse la musique dès son plus jeune âge. Commençant par le trombone puis le violoncelle, il développe sur ce dernier instrument une technique qui lui permet de jouer de la contrebasse, instrument qu’il choisit d’étudier au lycée.

A 17 ans, il commence à prendre des cours avec des contrebassistes réputés comme Red Callender et Herman Rheinschagen. Il se met déjà à composer et au début des années 1940 (à 18 ans !) il joue en tant que professionnel avec de grandes personnalités comme Louis Armstrong ou Dinah Washington. Mingus a également sa propre formation et enregistre un album en 1946 : Baron Mingus & His Octet. Le début de sa carrière est donc un succès.

Une vie intense

Créatif et productif, Mingus enregistre de nombreux albums. En une seule décennie, on compte 30 albums à son actif. Avec un de ses titres les plus connus, « Pithecanthropus Erectus », il introduit un nouveau style de jazz. Un jazz plus libre avec des parties entièrement improvisées. C’est le jazz des années 60. Compositeur, contrebassiste et pianiste célèbre, il gravit rapidement les échelons du bebop au hard bop.

Photo by Hans Kumpf (1st part)

Bien que son talent lui ait procuré un énorme succès, son caractère lui a souvent fait du tort. Sur scène il pouvait effectivement être agressif envers le public ou même les musiciens. Cela ne l’empêche pas, néanmoins, d’être un des grands musiciens dans le jazz. Charles Mingus nous quitte en 1979 (à 56 ans), en raison d’un long épuisement et surtout d’une paralysie due à la maladie de Charcot.

Photo by Hans Kumpf (2nd part)

Amir Abdullah et la Strata Concert Gallery

Bien longtemps après sa disparition, le DJ et collectionneur Amir Abdullah est contacté par la propriétaire de Strata Records, Barbara Cox. Elle lui apprend que la femme du batteur Roy Brooks a en sa possession un enregistrement de Charles Mingus en concret au Strata Concert Gallery. Un trésor !

Lors de la fin d’un séjour à Detroit, Mingus a en effet donné une prestation avec son quintet à 6$ l’entrée. C’est ce concert de février 1973 qui a été immortalisé par le batteur / producteur Robert « Bud » Spangler pour WDET FM, une radio publique autrefois dédiée au jazz.

Amir Abdullah témoigne : « Je tenais tant à entendre ce que personne n’avait entendu pendant plus de 40 ans que j’étais dans un état d’excitation extrême ! Quand j’ai finalement reçu le transfert initial de l’album, j’ai été démoli, non seulement par le son dynamique de la musique, mais aussi par l’intimité de l’enregistrement. Si vous êtes peu familier avec la Strata Concert Gallery, c’était un lieu petit et intime créé par Kenny Cox et ses prestations musicales dans l’état de Detroit. Detroit était un endroit sûr pour jeunes et vieux qui aiment les sons créatifs de non seulement le jazz, mais aussi comme Kenny dirait, ’’Le Son de Detroit’’. »

De la découverte à l’immortalisation

Un an plus tard (le 2 novembre 2018), l’album sort, grâce à BBE, 180 Proof Records, Strata Records et WDET-FM, sous le titre : Jazz in Detroit / Strata Concert Gallery / 46 Selden. Un album riche en couleur qui ressuscite et immortalise Charles Mingus en 4,5 heures.




Tout l’album est évidemment à découvrir. Faisons malgré tout un focus sur les solos, tous magnifiques. D’abord celui de la trompette, accompagnée d’un chabada à la batterie, d’accords piqués au piano et de la contrebasse en walking basse. Aérien, le solo se détache de l’accompagnement, il ne suit pas les conventions d’un solo typique dans le blues (c’est un autre monde que celui du bebop).

Comme pour la trompette, le solo de piano comporte de longs chorus. Quant à celui de saxophone, il est plus rapide dans sa manière d’enchaîner les phrases musicales. Plein et d’un style rythmique différent, il emmène d’ailleurs le batteur. Après un bref rappel du thème par le piano c’est au tour de Mingus de s’exprimer. Mais à peine quelques phrases plus tard, la batterie prend le solo.

Ceux de contrebasse ou de batterie sont vraiment atypiques. Alors que, dans le jazz, les chorus des soufflants ou du piano sont habituellement joués en mélodie accompagnée, la contrebasse et la batterie, eux, demandent la pleine attention au public avec, quelquefois, une intervention d’une seconde des autres accompagnateurs. Quelle audace !

Box Sets

Outre l’originalité et la virtuosité de ces musiciens, la sortie exceptionnelle de cet album devrait donc réjouir tous les amateurs de jazz. Une belle idée de cadeau pour Noël !

Louise Hodé

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