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Rencontre avec Kaz Hawkins : quand la soul rime avec rédemption

Juliette Labati 12 juin 2023
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Kaz Hawkins © Philip Ducap

Dès qu’elle chante, Kaz Hawkins nous entraîne dans son univers haut en couleurs. Ses mots simples décrivent parfaitement les émotions qu’elle exprime par le biais d’une expression artistique en phase avec son esprit libre et attachant. Kaz Hawkins n’a jamais caché son passé douloureux, mais son histoire personnelle est devenue une force à travers des textes émouvants et une interprétation d’une sincérité et d’une intensité rares ! Pour la sortie de son nouvel album “Until We Meet Again”, Kaz répond à nos questions.

Ta vie n’est pas un “long fleuve tranquille”. Peut-on dire que la musique t’a sauvé la vie ?

Oh oui et c’est au cœur des chansons que j’écris. C’est ma mission de prouver que la musique peut sauver des vies. Nous savons déjà que la musique guérit, mais dans mon cas, elle m’a littéralement sauvée car j’ai commencé à transformer mes notes en paroles après avoir appris quelques accords à la guitare. C’est devenu une nouvelle habitude car j’avais cessé de consommer de la cocaïne, ce qui m’a aidée à avancer dans la vie.

Avec ce nouvel album, il semblerait que tu veuilles tourner une page ?

J’ai l’impression que je tourne toujours des pages car je ne veux pas m’arrêter d’explorer mais oui, d’une certaine manière, on peut dire ça que parce que j’ai trouvé la paix ici en France, je suis dans un état d’esprit différent. Je veux m’amuser et célébrer le fait d’avoir 50 ans, un moment que je n’aurais jamais pensé atteindre. J’écrirai toujours des chansons cathartiques et il y en plusieurs sur cet album qui mettent en valeur d’autres facettes. Je suis un peu excentrique et drôle, c’est l’Irlandaise qui est en moi et je sens enfin que je peux la laisser s’exprimer maintenant sans me prendre la tête.




Qu’est-ce qui t’inspire pour écrire des chansons ?

Principalement mes propres expériences, mais j’aime regarder les gens et imaginer à quoi ressemble leur vie. J’aime laisser libre cours à mon imagination et cela me ramène à l’époque où j’écrivais des poèmes dans ma jeunesse. Maintenant, au lieu décrire des poésies pour libérer ma douleur, je crée des scénarios colorés dans mon imaginaire. Quand je suis attristée par ce qui se passe dans le monde alors je proteste avec mes mots, comme sur Hold On For Home, c’est une chanson qui demande où sont les héros d’aujourd’hui comme Martin Luther King ou les contestataires musicaux comme Bob Dylan. Je dédie cette chanson sur scène à ceux qui veulent juste rentrer chez eux en Ukraine.

Lorsque tu composes une chanson, est-ce les paroles ou la mélodie qui arrivent en premier ?

Il n’y a pas de recette mais c’est plus facile pour moi d’écrire des paroles. Les gens me mettent au défi d’écrire des paroles rapidement sur place et sont toujours surpris quand ça roule sur ma langue. Je pense que c’est parce que j’ai écrit dans mes carnets pendant des années. Il y a des moments fous où je n’arrive pas à sortir un accord de ma tête et je dois m’asseoir au piano ou jouer de la guitare pour trouver où cela me mène. Je travaille aussi à partir de beaucoup de rythmes et je joue du Bodhrán, un tambour irlandais, comme Lonely Boy sur l’album, il a été créé à partir du rythme, puis j’ai ajouté une guitare acoustique qui a collé au rythme.

Etta James t’a beaucoup influencée. Quel(le)s artistes actuel(le)s écoutes-tu ?

J’écoute plus d’artistes masculins ces jours-ci, car toute ma vie j’ai écouté des chanteuses. Etta James sera toujours dans mon cœur, mais maintenant je m’intéresse à des artistes comme Nathaniel Rateliff & The Night Sweats, Chris Stapleton. J’aime aussi beaucoup Tedeschi Trucks Band en ce moment.

On m’a dit que tu animes une émission de blues sur BBC Radio Ulster. Peux-tu nous en dire un peu plus ?

Oui, j’ai fait 8 saisons jusqu’à l’année dernière mais j’ai fait une pause pour me concentrer sur le nouvel album et la tournée cette année. Je l’avais présenté aux studios de la BBC à Belfast, mais j’ai ensuite déménagé en France et je l’enregistrais à distance depuis mon petit studio. Ça s’appelle Kaz Hawkins Got The Blues et c’était mes rapports sur la vie de la tournée et les groupes que je voyais , le tout mélangé avec d’anciens et de nouveaux morceaux de blues. C’était la première émission de blues sur BBC Radio Ulster, donc j’en suis très fière.

Kaz Hawkins © Philip Ducap

Van Morisson (dont de nombreuses chansons sont présentes sur la bande originale du film Belfast) est le parrain de la scène blues en Irlande. Est-il une référence pour toi ?

Je suppose que vous pourriez dire que même si son répertoire va bien au-delà du blues, je pense qu’il préférerait, comme la plupart des artistes, être connu pour son écriture et son talent artistique et non pour un genre, mais je ne peux pas nier sa contribution à la scène blues de Belfast.

Peux-tu nous parler de la scène blues actuelle en Irlande ?

Depuis que je suis partie il y a près de 4 ans maintenant, ça a vraiment changé. Ma bonne amie Grainne Duffy de Monaghan vient de sortir son album et  je suis tellement fière qu’elle prenne sa place dans l’histoire du blues irlandais, d’autant plus que les femmes ne sont pas nombreuses en ce moment. La scène blues a toujours été riche mais surtout avec des groupes locaux qui gagnent en respect mais ne tournent pas vraiment à l’international ce qui est triste.




Tu as des tatouages, ont-ils une signification particulière ?

Chacun de mes tatouages a une signification, je ne vais pas entrer dans le détail mais j’ai récemment commencé un nouveau tatouage avec une merveilleuse artiste basée à Oradour-sur-Glane. Les Encres de Fahé ont créé une sorte de corde partant de mon bras gauche et parcourant tout mon corps. Fahé est très spirituelle et à chaque séance elle ajoute quelque chose de différent à la ligne. La plupart sont des drapeaux des pays que j’ai visités, ou des rubans pour la santé mentale, la violence domestique, la sensibilisation au suicide et ils sont tous liés à une colombe. Mon idée est que partout où je me retrouverais dans le monde, je reviendrais toujours à Fahé pour ajouter uniquement à ce tatouage et cela ne finira jamais parce que même quand mon corps disparaitra, mon esprit survivra et je pourrais voir mon voyage sur mon corps.

Tu vis en France. Qu’est-ce qui a motivé ce choix ?

J’avais de plus en plus de concerts en France, ce qui était la première raison. Il était temps pour moi de passer à autre chose émotionnellement car ma patrie me rappelait le traumatisme partout où j’allais. Je n’imaginais pas la paix que je trouverais en France et je le dis à tout le monde, j’ai l’impression d’avoir été adoptée par mes fans ici, ce qui est réconfortant puisque j’ai laissé tout ce que je connaissais en Irlande du Nord. Les fans français m’ont submergée d’amour et de soutien.

Tu vas te produire dans le Gouffre de Padirac les 23 et 24 juin. Comment abordez-vous cette expérience unique ?

Cet événement est très spécial et unique, non seulement à cause de l’emplacement, mais aussi parce que fournir la musique est le défi car nous ne pouvons pas avoir d’instruments à cordes dans la grotte, nous ne pouvons donc pas jouer du piano. Je l’ai visitée en mars pour avoir une idée et j’ai passé du temps avec la propriétaire pour voir ce qu’elle envisageait. Nous nous sommes connectées et je savais que je voulais lui proposer un voyage spirituel qui reliait la musique à la terre et cette merveille que le monde vient visiter. Je prends a cappella mes chansons les plus spirituelles et émouvantes avec le soutien du Soulshine Voices Choir de Toulouse, nous aiderons les invités à se sentir plus connectés à cette merveille naturelle. Nous conduirons ensuite les invités dans des bateaux le long de la rivière en contrebas et chanterons un chant irlandais The River That Sings en dédicace à Édouard-Alfred Martel et George Beamish. Ce sera une expérience unique pour nous tous.

Retrouvez Kaz Hawkins le 30 juillet 2023 au Fest Jazz à Châteauneuf-du-Faou

Propos recueillis par Juliette Labati

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