A l’Opéra de Nice, “The Vertiginous thrill of exactitude”, “Les Indomptés””, Trois gnossiennes” et “Cacti”

Forsythe, Brumachon, Van Manen, Ekman, quatre chorégraphes contemporains à l’écriture radicalement différente. Le Ballet de l’Opéra de Nice nous offre l’occasion de découvrir ou revoir quatre pièces emblématiques de leur travail : The Vertiginous thrill of exactitude, Les Indomptés, Trois gnossiennes et Cacti.

Créé en 1996 pour le Ballet de Francfort, The Vertiginous thrill of exactitude est une des pièces virtuoses de William Forsythe. Elle est aussi, sans doute, la plus fidèle aux codes du ballet classique comme si le chorégraphe avait marqué une pause dans son travail de déconstruction du vocabulaire académique. Feux d’artifices de pirouettes, de grands jetés, d’arabesques, William Forsythe y a ajouté son univers fait d’hyperextensions, de grande vélocité dans les enchainements et de jeux sur les changements de directions. Vifs, précis, les danseurs du Ballet de Nice ont assuré avec talent cette entrée en matière pleine de style.

Changement d’univers avec le duo Les Indomptés de Claude Brumachon. Avec son complice le danseur Benjamin Lamarche, le chorégraphe a développé une gestuelle très particulière faite de mouvements précis et nerveux, de chutes et de portés aériens, où puissance et légèreté se combinent. Les deux danseurs évoluent d’abord en parallèle puis se répondent, se fuient, s’affrontent et se retrouvent, sur une chanson du compositeur Wim Mertens. Théodore Nelson et Riccardo Rodighiero ont intégré toute la complexité des enchainements, mêlant force et mystère, permettant ainsi à chaque spectateur de s’approprier la pièce. Certains y verront la dualité d’une seule et même personne, la métaphore d’un couple et d’autres se laisseront absorber par la poésie abstraite du mouvement, tout simplement.

Longtemps chorégraphe résident au Ballet national des Pays-bas – Het National Ballet-, Hans Van Manen est l’un des grands chorégraphes européens d’expression néo-classique. Créé en 1982, Trois gnossiennes est un duo sur la célèbre composition pour piano d’Erik Satie, jouée sur le plateau. Le chorégraphe a ici décliné trois variations sur le thème du couple. La danse est intense, raffinée, avec cette couleur flamande où classicisme et minimalisme vont de paire. Avec leur technique impeccable et leur présence scénique, Veronica Colombo et Luis Valle ont réussi à donner une belle épaisseur à leurs personnages.

La soirée s’achève avec Cacti, créé en 2010 pour le Nederland Dans Theater, célèbre compagnie de danse contemporaine des Pays-Bas. Ce ballet qui a fait connaître Alexander Ekman sur le plan international, est, depuis, au répertoire de plus d’une vingtaine de compagnies classiques prestigieuses. Ici, le chorégraphe suédois mêle danse et théâtre dans une sorte de performance qui brocarde, avec un humour caustique, l’art contemporain. Pièce très écrite, succession de solos, duos et ensemble ou encore saynètes avec voix off, Cacti exige une grande rigueur notamment dans les synchronisations, pour donner tout son mordant à la pièce. Les danseurs du Ballet de Nice partagent une joie communicative à se confronter à ce mode d’expression relativement éloignée de leur répertoire habituel.

Cacti © A. Sarkar

Avec cette soirée, le Ballet de l’Opéra de Nice nous a offert un voyage dans trente ans de création chorégraphique et a montré, une fois de plus, son haut niveau. La compagnie est prête à démarrer une belle aventure artistique avec son nouveau directeur, le Suédois Pontus Lidberg.

Stéphanie Nègre