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“Dans la cour” : Rencontre au sommet

25 avril 2014
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Dans la cour

De Pierre Salvadori

Avec Catherine Deneuve, Gustave Kervern, Féodor Atkine

Durée : 100 min.

Sortie le 23 avril 2014

dans_la_cour_290_193Deneuve-Salvadori : la rencontre sonne comme une évidence. L’univers doux amer du cinéaste et dialoguiste aux seulement huit films et la folle énergie de l’icône au demi-siècle de tournages fusionnent à merveille pour un grand moment de comédie et d’émotion savamment dosés. Diaboliquement écrit et doté d’une interprétation sans faille, « Dans la cour » s’inscrit comme une réussite majeure dans le parcours du cinéaste autant que celui de la comédienne.

 
Lors de l’avant-première parisienne, l’air presque emprunté, il annonçait « Ce nouveau film risque de surprendre, peut-être de décevoir car il est beaucoup plus noir que mes précédents. Je préfère prévenir : c’est surtout une tragédie ». Il faudrait toujours se méfier d’un cinéaste qui a érigé le mensonge en postulat dans un des plus fameux jalons de sa courte mais passionnante filmographie («… Comme elle respire » avec Marie Trintignant et Guillaume Depardieu). Combien d’auteurs de productions prétendues comiques souhaiteraient récolter ne serait-ce qu’un dixième des rires que va susciter le nouvel opus de l’auteur des « Affranchis » et « Hors de prix » ?

Antoine, musicien paumé, arrive au Pôle Emploi avec sa nonchalance désabusée et se voit proposer un job de gardien d’immeuble. Les habitants y sont tous plus ou moins fracassés, bourrés de ces petites manies contractées au fil d’une existence monotone à mourir. Parmi eux, Mathilde, jeune retraitée qui développe une phobie des fissures après en avoir décelé une dans son appartement. Les deux naufragés de la normalité vont se rapprocher, s’entraider…

Salvadori n’a pas son pareil pour distiller dans un cinéma résolument comique quelques ombres noires issues de son observation du monde. Les laissés pour compte, les loosers, les Oblomov des temps modernes (« Les affranchis ») ou ceux qui frappés d’un grain de folie se marginalisent pour échapper au système ont toujours chez le cinéaste la part belle chez le cinéaste (et scénariste). Les fracassés de l’existence qui s’en inventent une plus belle (« Comme elle respire »), les candidats au suicide par amour (« Après vous ») ont sous sa plume cette pétulance aussi drôle qu’humaniste qui font naître les vraies comédies dramatiques, ce genre souvent fourre-tout du cinéma.

 
Deneuve magistrale

La rencontre de ce cinéaste très fidèle à certains de ces comédiens, hélas pour deux d’entre eux partis trop vite (Marie Trintignant et Guillaume Depardieu) avec l’icône de notre cinéma hexagonal devrait suffire à attiser les curiosités. En plus d’un demi-siècle de cinéma, Catherine Deneuve a tout fait, tout osé, incarnant la liberté et l’indépendance absolues. Elle parvient pourtant encore à surprendre avec un jeu d’une précision implacable et une énergie toujours aussi débordante. Dominant sans le vouloir, car bien loin de ces contingences-là, la planète du cinéma français, se contentant de quelques prises de position aussi réfléchies que spontanées, la bêtise d’un Delon ou la provoc d’un Depardieu en moins, elle fait surtout ce qu’elle sait le mieux : jouer. En choisissant avec un flair indéfectible des rôles et des cinéastes qui lui garantissent ce qui a toujours constitué sa quête profonde : son insaisissable liberté. Elle est sublime dans ce rôle complexe de femme qui s’enlise dans la folie. Et offre à son cinéaste une place de plus en plus indétrônable dans la cour des grands…
 
Franck Bortelle

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