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Grégoire Prangé : “La passion pour l’art vient de mon enfance”

Yang Jiechang, Exposition "Dark Writings", Galerie Jeanne Bucher Jaeger, Marais, Paris © Vincent Rola

Chargé de la coordination de la conservation au LaM, commissaire d’exposition et critique d’art en parallèle : rencontre avec Grégoire Prangé, passionné d’art contemporain. 

Bonjour Grégoire, peux-tu te présenter ? 

Je m’appelle Grégoire Prangé, je suis chargé de la coordination de la conservation au musée du LaM, Lille Métropole Musée d’art moderne, d’art contemporain et d’art brut à Villeneuve-d’Ascq. En parallèle, je suis commissaire d’exposition et critique d’art indépendant. 

Quel est ton parcours scolaire ? 

Quand j’ai eu mon BAC en 2011, je suis monté à Paris pour faire une prépa littéraire avec dominante histoire et latin pendant 3 ans au lycée Henri IV, ce qui ne prédisposait pas trop à l’art contemporain. Ensuite, je suis rentré en master I d’histoire médiévale à Paris 1 Panthéon-Sorbonne et en parallèle j’ai fait l’école du Louvre ; c’est là-bas que j’ai pris la spécialité art contemporain. À la fin de mon master à la Sorbonne, j’ai commencé l’ESSEC, une école de commerce que j’ai faite en parallèle de la fin de mon parcours à l’école du Louvre. Tout ce parcours étudiant s’est terminé en janvier 2021. 

D’où vient ta passion pour l’art contemporain ? 

La passion pour l’art vient de mon enfance, ça vient aussi de mes parents, on allait voir beaucoup d’abbayes, d’églises, de musées etc. Au début, j’étais vraiment passionné par l’histoire et au fur et à mesure de mes études, je me suis rendu compte que j’étais intéressé par plein de choses.  De base, je détestais l’art contemporain, j’avais beaucoup d’arguments contre et j’en étais assez convaincu. En rentrant à l’école du Louvre, je devais choisir une spécialité parmi une trentaine et je me suis dit que j’avais envie de découvrir et de comprendre pourquoi il y avait tant de monde qui s’intéressait à l’art contemporain.
Au départ, je suis arrivé avec beaucoup d’a prioris et j’ai eu une professeure d’art contemporain qui, en l’espace de quelques semaines, m’a totalement fait changer d’avis. De fil en aiguille, je me suis intéressé à d’autre formes d’art contemporain et il y a eu une sorte d’engrenage jusqu’à ce que j’ai eu besoin d’écrire dessus. J’ai encore plus découvert, rencontré du monde et ça a totalement changé ma perception sur l’art contemporain. 

Peux-tu nous parler de ton métier de chargé de la coordination de la conservation au LaM ?

La conservation est un service du musée qui regroupe les conservateurs, ceux qui sont attachés de conservation, le responsable de la programmation culturelle et la bibliothèque. Mon travail a plusieurs aspects, celui de coordination des activités service : les acquisitions, la conservation des collections, les expositions, les publications… Il y a aussi un travail sur les expositions : soit je suis commissaire, soit commissaire associé ou assistant commissaire, tout dépend de l’exposition.

Guillermo Kuitca, Untitled (Sans titre), 2020, Huile sur toile montée sur carton. 18 x 13 cm (chaque panneau). Photo : Martín Touzón. © Guillermo Kuitca

Est-ce que tu peux nous parler de « Jeunes critiques d’art » et de YACI « International Young Art Criticism », les collectifs que tu as co-fondés en 2016 et 2019 ?

Avec des amis de l’école du Louvre, on avait envie d’écrire sur ce que l’on voyait. On a remarqué qu’il y avait aussi une sorte de déconnexion des textes qu’on pouvait lire, que c’était souvent incompréhensible, assez pompeux et on se disait que même si nous qui étudions ça, on avait du mal à comprendre ces textes, comment le grand public pouvait-il s’y retrouver ?
Quand on a commencé à vouloir écrire, on ne trouvait pas forcément de revues avec lesquelles ont était en phase. C’est là qu’on s’est dit qu’on pouvait créer une revue en ligne sur laquelle on publierait nos textes de manière totalement libre. En plus de cette plateforme d’écriture, on fait aussi des partenariats avec d’autres acteurs du monde de l’art, on essaye de développer de nouveaux formats pour que l’écriture critique sorte du texte comme des podcasts, des vidéos : le collectif est vraiment un terrain d’échange et d’expérimentation.
L’expérience était tellement dingue, on a tous tellement appris, qu’on s’est dit que ce serait génial de trouver des collectifs similaires ailleurs dans le monde. On s’est vite rendu compte qu’il y avait peu de collectifs de critiques à l’étranger. On a créé YACI et proposé à des personnes dans le monde entier de se regrouper en collectif, de les confédérer et de créer une très grande plateforme pour permettre à tous les collectifs de publier dans leur langue d’origine mais également en anglais pour que le public international puisse avoir accès aux textes.

Est-ce que tu peux nous en dire un peu plus sur le podcast ? 

Le podcast s’appelle « Pourvu qu’iels soient douxces », il est produit et diffusé par Projets média. Il y a 4 ou 5 membres du collectif qui sont autour d’une table et on voulait rejouer tous les débats qu’on pouvait avoir entre nous en terrasse de café ou en soirée. On voulait pouvoir le faire devant un micro pour que les gens puissent avoir accès à ces échanges qui nous paraissent importants. C’est un podcast qui dure environ 45 min et qui est découpé en 2 parties. Dans un premier temps, on échange sur une exposition avec un regard critique et dans la seconde partie, on discute sur une thématique plus générale sur le monde de l’art.
Vous pouvez retrouver le podcast sur toutes les plateformes de diffusion : Spotify, Apple podcast, Soundclound et bientôt sur le site de Projets média.

Camille Bardin et Grégoire Prangé lors de l’enregistrement du podcast “Pourvu Qu’iels Soient Douxces” au Studio Penny Lane, Paris, 7 mai 2021. Photo © Adrianne Louet pour Projets média

Tu as également co-fondé « Quelque chose de neuf », peux-tu nous parler de ce projet associatif ? 

Il y a environ 4 ans, une artiste, Camille Sauer, m’a contacté sur mon Instagram, et en allant voir son site, j’ai trouvé ça super ! J’ai commencé à écrire sur son travail et de là, on a échangé sur le monde de l’art et sur les initiatives qu’on pouvait apporter dans ce milieu. On a créé une association qui s’appelle « interférences » pour porter 2 projets bien distincts.
Le premier projet s’appelait « la nuit des interférences ». On voulait faire une manifestation annuelle d’art collaboratif dans la rue sur une nuit entière dans Paris. Mais avec la situation sanitaire actuelle, il est impossible de monter ce projet. Il est donc clairement en stand by pour le moment.
Puis, il y a un deuxième projet qui s’appelle « quelque chose de neuf », qu’on a pensé comme une boîte de production d’expositions associative. Notre point de départ était notamment les besoins des artistes émergents, surtout quand ils sortent d’écoles. Ils ont souvent une production assez importante et manquent de moyens pour montrer leur travail/ projet. On s’est posé la question : de quoi a besoin un artiste émergent pour monter un projet ? On a regroupé une équipe d’une centaine de personnes dans le but de pouvoir choisir les artistes via des appels à projet et voter pour les projets que l’association allait porter.
On a monté la première exposition en octobre 2019, la seconde en décembre et la troisième en février 2020. Puis, il y a eu le Covid. La prochaine exposition sera à découvrir du 15 au 26 mai au Garage Amelot à Paris, avec l’artiste Vanina Langer.

Vue du montage de l’exposition Vanina Langer, “Je ne sais pas si c’est la poule ou l’oeuf et Marguerite non plus”, Garage Amelot, Paris, 15-26 mai 2021. Photo © Vanina Langer.

En parallèle, tu es aussi commissaire d’exposition indépendant, comment montes-tu les expositions et comment tu rencontres les artistes ? 

En dehors du musée, soit ce sont les artistes avec qui je suis en relation depuis un certain temps qui veulent monter un projet. Ils vont me demander de les accompagner, et, à partir de ce moment là, on va travailler ensemble pendant plusieurs mois sur le projet. On va trouver un lieu et monter l’exposition ensemble.
Ensuite, il y a une deuxième façon de faire, c’est quand le lieu me contacte directement pour monter une exposition. Dans ce cas, le lieu et le financement sont déjà trouvés, c’est plutôt un travail de sélection des œuvres, de construction des discours, d’étude de narration et ensuite d’accrochage. 

Aurais-tu un ou plusieurs conseils à donner à quelqu’un qui souhaite se lancer dans un métier d’art ? 

C’est un milieu qui est passionnant, qui peut paraître fermé, mais dans notre génération on a vraiment envie de changer les choses. Je pense qu’il ne faut pas avoir peur de se lancer, de rencontrer des gens, de créer des projets parce que ça vaut vraiment le coup. Ensuite, je pense qu’il faut être très curieux, aller voir plein de choses, et surtout garder l’esprit ouvert. 

Propos recueillis par Agathe Bourdeauducq 

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