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Léa Drucker – interview

24 juin 2013
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lea drucker

Léa, comment êtes-vous entre dans la sphère du théâtre ?

J’ai commencé au club de théâtre de mon lycée, à l’âge de 17 ans. J’ai eu un prof formidable qui m’a encouragée à poursuivre mais mon père ne l’entendait pas de cette oreille. Scientifique avant tout, il était sans doute effrayé par le milieu artistique. J’ai donc passé mon bac pour lui faire plaisir et ensuite j’ai pu suivre le cours de Vera Gregh, parce que j’avais lu dans le magazine 20 ans, que des actrices en place comme Juliette Binoche ou Karine Biard le fréquentaient. C’était donc très inspirant pour moi. Puis, j’ai réussi le concours de l’Ecole de la rue Blanche à 18 ans, signe que je ne m’étais pas complètement plantée. Ensuite, sont venus les castings et de tous petits rôles au cinéma et au théâtre.

Et le succès ?

Oh non, cette époque marqua le début de dix ans de galère au cours desquels j’ai fait tous un tas de petits boulots pour vivre ! Le métier de comédien est très difficile. Il faut savoir se présenter. Or, quand on est très jeune, on ne sait pas qui l’on est vraiment et les réalisateurs ont du mal à vous cerner. J’ai mis du temps à me trouver mais, tout en travaillant à gauche et à droite, je continuais à faire des stages et à décrocher quelques rôles.

Votre nom ne vous a pas aidée ?

Ben non ! Certes, mon nom était célèbre avant que je fasse quoi que ce soit mais les rencontres ne suivaient pas obligatoirement, c’était même presque un frein. Mais une fois que l’on joue, l’avantage d’un nom est d’attirer plus facilement l’attention des médias.

Quel fut le déclic qui vous a permis d’être là où vous en êtes aujourd’hui ?

Un jour, après une audition de trop -que j’avais longuement préparée et où on m’a à peine regardée- je me suis dit que je n’avais pas le mental pour poursuivre dans ce métier, ce malgré ma grande envie. J’ai donc décidé d’arrêter et ce jour-là, un comédien m’a proposé de venir avec lui à une audition pour un metteur en scène américain, John R. Pepper, désirant monter une pièce à Paris… et j’ai été prise ! Cependant, je n’avais pas les moyens financiers de partir répéter en Normandie. J’en ai parlé au metteur en scène… et il m’a prêté de l’argent. Ou a ensuite joué à Paris, au Proscenium. La presse est venue, a aimé, le public aussi. Puis un producteur qui nous a produit à Avignon et nous avons joué au Dejazet. L’adaptation a été faite au cinéma. J’ai été nominée aux Molière. J’ai ensuite pu faire des rencontres qui m’ont aidée à avancer dans ce métier. Bref, tout est parti de Dany et la grande bleue !

Aujourd’hui, vous êtes une comédienne heureuse ?

Très heureuse ! Ce d’autant plus que, quand j’étais gamine, je savais que je voulais être comédienne. Oh, je ne me voyais pas en star de cinéma car je n’arrivais pas à me projeter dans ces actrices très femmes, très glamour. C’est à l’arrivée de filles plus simples comme Charlotte Gainsbourg que je me suis dit : c’est peut-être possible !

Comment faites-vous le tri dans les propositions que vous recevez ?

J’ai du mal. Il faut que j’en me reconnaisse dans ce que l’on me propose. Je suis avant tout attirée par de fortes personnalités comme Édouard Baer ou Michel Fau qui ont un univers personnel fort risqué. Ça m’enrichit, je suis bien avec eux et j’y vais aveuglément. Par contre, au cinéma, je choisis en fonction du scénario car je fais beaucoup de premiers films. Ma décision intervient après avoir rencontré le réalisateur.

Et comment choisissez-vous entre cinéma et théâtre ?

Le théâtre, c’est difficile. On doit s’engager sur le temps et c’est éprouvant. J’aime y être avec des gens avec qui je suis connectée artistiquement. Ces derniers temps le théâtre a pris beaucoup de place et c’était très bien. Ça m’a permis de faire des films que j’aimais vraiment et en lesquels je croyais… et donc pas simplement pour des raisons financières.

N’est-vous donc pas tranquille de ce côté-là ?

On n’est jamais tranquille quand on est comédien ! On ne sait jamais ce qui va se passer après…

Vous passez de A la française d’Édouard Baer à Demain il fera jour de Montherlant. Difficile de trouver des registres plus différents…

J’aime beaucoup la comédie. Je pense que c’est plus mon truc mais avec l’expérience je me rends compte que la tragédie et la comédie c’est presque la même chose dans la mesure où ce sur quoi repose la comédie et ce sur quoi repose la tragédie, c’est la même chose. La comédie ne fonctionne que si c’est très incarnée. Ce qui est drôle c’est la situation. Et jouer Montherlant, c’est un plaisir absolu car c’est à la fois une comédie noire, grinçante, cruelle et une vraie tragédie. J’y fais tout ce que j’ai toujours voulu faire… avec en plus une sorte de clin d’œil à des acteurs et à un style du passé que Michel Fau sait rendre moderne. Je m’y reconnais complètement car j’ai été bercée par ces actrices d’antan.

Qu’est-ce qui vous plaît avant tout dans votre métier ?

Vivre des choses qu’on ne vit pas dans sa propre vie ! C’est un terrain de jeu sur lequel on peut tout se permettre : être horrible, génial, beau, laid, une mère folle à lier… ou vivre une passion dévorante pour un homme, pour une femme, pour un enfant, pour un animal… même si ce n’est pas la même chose (dit-elle en riant et en regardant son chien couché à ses pieds). C’est une certaine folie… mais une folie géniale !

Caroline Fabre

[Photo : © Marcel Hartmann]

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