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Roméo et Juliette, la version interdite

11 juillet 2009
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Que nous montre la version interdite de Roméo et Juliette ? Elle nous montre les héros shakespeariens de la célèbre pièce sous un jour beaucoup moins héroïque et noble : Juliette, interprétée très justement par Delphine Herrmann, est une névrosée, qui, certes rêve d’amour, mais dont l’intransigeance, l’aigreur à la limite de la misanthropie et le narcissisme ne peuvent tolérer qu’un amant inconsistant et soumis à ses moindres désirs ; Roméo est un peureux un peu idiot sur les bords, mais qui néanmoins parvient, à de rares moments, à faire preuve de bravoure ; la méchanceté et la dureté de Tybalt ne sont que les fruits de ses frustrations d’enfance et du mauvais traitement qu’il a subi. Ainsi, Roméo et Juliette, la version interdite met en scène des êtres beaucoup plus humains dans le sens où tous les défauts que nous partageons et toutes les obsessions de notre temps sont intégrés à l’histoire. La pièce nous parle de nous, donc, mais ce qu’elle nous dit, finalement, c’est que malgré ces défauts, malgré le manque de courage, l’intolérance dont nous pouvons faire preuve, nous pouvons malgré tout avoir nos petits moments héroïques et être touchés par la beauté et l’amour.

La pièce ne tombe pas cependant dans le théâtre psychologique. Les traits sont caricaturés, le jeu sur le corps accentué, ce qui fait bien de Roméo et Juliette une farce satirique. Les situations sont de ce fait amusantes, cocasses et le tout reste très drôle, bien que grinçant par moment : Roméo et Juliette finissent bien par mourir, mais il semble que ce soit plus par erreur que par passion, ce qui provoque un trouble léger dans l’impression finale que laisse la pièce.

L’écriture de  Hubert Benhamdine est intéressante : elle mêle langage parlé et soutenu, expressions d’aujourd’hui et d’autrefois, soignées quand il le faut, ce qui donne un effet assez curieux et délectable puisque drôle par le contraste, mais également beau et très agréable par les échos shakespeariens qui reviennent sans cesse. La pièce se déroule toujours, d’ailleurs, au XVIème siècle, mais elle est parsemée d’anachronismes qui viennent épicer la représentation et accentuer le contraste. La fin par contre est peut-être un peu précipitée, les dernières scènes paraissant plus courtes et un peu rapides, ce qui donne l‘impression d‘une ébauche ou d‘une fin un peu moins aboutie. La mise en scène, qui se rapproche donc de la farce et même de la commedia dell’arte, est quant à elle bien rythmée.On note quelques maladresses mais il est possible que ce soit surtout dû à l’étroitesse du lieu.

Roméo et Juliette, la version interdite est donc dans l’ensemble un spectacle intéressant, qu’on regarde avec plaisir et  qui nous replonge autrement dans l’univers shakespearien, dont on ne se lasse pas.

Chloé Goudenhooft

Roméo et Juliette, la version interdite

Avec Delphine Herrmann, Laure Sardin, Hubert Benhamdine, Julien Cigana, Nicolas Devort et  Florian Goetz

Scénographie : Stéphane Bardin
Costumes : Philippe Varache
Musique : Hervé Jamet
Créateur lumières : Raphaël Knoepfli

Durée : 1h15


Spectacle présenté : 
– du 8 au 31 juillet 2009 au Théâtre de l’Etincelle (Avignon)
à partir d’octobre 2013 au Grand Point Virgule

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