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Haendel nous fait monter au ciel avec Theodora au TCE

11 octobre 2015
1902 Vues
20151001-08VP

Theodora

De Georg Friedrich Haendel

Mise en scène de Stephen Langridge 

Avec Katherine Watson, Stéphanie d’Oustrac, Philippe Jaroussky, Kresimir Spicer et Callum Thorpe

Orchestre et Choeur Les Arts Florissants

Les 13, 16, et 20 octobre à 19h30, dimanche 18 octobre à 17h

Tarifs : de 5 à 140 euros

Réservation
en ligne ou par tél au 01 49 52 50 50 

Durée :3h

Théâtre des Champs Elysées
15 avenue Montaigne
75008 Paris
M° Alma Marceau ou Franklin Roosevelt

www.theatredeschampselysees.fr

20151001-08VP copieLa surprise est divine. William Christie, en pleine forme dirigeant les Arts Florissants avec de jeunes chanteurs magnifiques pour incarner cette histoire de passion et de mort aux débuts de la chrétienté, sous la domination des Romains. Un oratorio céleste qui dénonce aussi la tyrannie des politiques face à la liberté amoureuse et religieuse.

20151001-19VPUn oratorio de passions humaines

Il y a dans cet opéra, que Georg Friedrich Haendel composa à la fin de sa vie, à 64 ans, tout ce qui séduit dans une tragédie : un amour contrarié par le pouvoir, une guerre de religions, un tyran qui oppresse des innocents au coeur pur dont l’humanité monte en fin de compte au ciel avec une mort en forme de martyre ! Du Corneille pour le martyre et la sainteté en quelque sorte, mêlé à du Racine pour la finesse psychologique des passions humaines et la théâtralité du livret et de la musique. Finalement, la partition composée par Haendel est d’une beauté et d’une richesse musicale tout à fait poétique, avec ses images et ses redites en forme de méditations, qui font s’arrêter le temps au cours de parenthèses enchantées. C’est peut-être ce qui explique l’amour particulier du chef William Christie pour cette oeuvre qu’il monte pour la deuxième fois déjà, après la mise en scène de Peter Sellars.

20151007-24VPAmour, liberté et soif d’absolu

De quoi s’agit-il ? A  Antioche, en Turquie, deux jeunes filles chrétiennes, Irène et Theodora, refusent de se soumettre aux ordres du Président qui intime à chacun des sujets romains de rendre un culte à l’Empereur. Elles refusent, mais deux soldats romains, Septime et Didyme, lui-même Chrétien, comprennent ce refus. Quand Theodora est envoyée en prison pour y subir le sort des prostituées de l’Empire face à des soldats romains en rut, Didyme, dans un élan amoureux, va tenter d’échanger sa place avec l’héroïne. Tous deux, idéalistes et purs, finiront par être tués par le tyran devant des choeurs chrétiens éplorés. Percutant de plein fouet l’actualité brûlante avec son lot de tyrannies et de viols de femmes, de mises à mort arbitraires et d’intolérance religieuse, l’opéra n’est pourtant pas monté avec la crudité d’un réalisme immédiat. La mise en scène du Britannique Stephen Langridge est d’une finesse et d’une simplicité lumineuses. Utilisant une scénographie intemporelle avec des parois de murs mobiles, jouant sur des espaces ouverts ou fermés, baignés d’une lumière crépusculaire ou dorée (très beau travail de Fabrice Kebour), il place les chanteurs et les choeurs dans l’espace mental de leur délibération psychologique ou de leur élan sentimental. Seuls repères de la situation politique : des photographies en noir et blanc de condamnés à morts sont collés sur un mur. Les costumes sont justes symboliques : parquas militaires pour les hommes, robe souple blanche pour les deux femmes après que Theodora, d’ascendance aristocratique, se soit délestée de sa parure de princesse en ayant fait voeu de pauvreté.

20151001-18VP copieDes interprètes qui magnifient l’oeuvre

Le casting de voix réunies sur cette production est ici particulièrement réussi. Au centre de l’oeuvre, des choeurs nombreux et puissants, qui sont la colonne vertébrale de l’opéra. Saluons la prestation, la puissance et la précision des chanteurs de l’ensemble des Arts Florissants qui, comme les instrumentistes, font corps avec leur chef dans une unité harmonieuse et respectueuse de toutes les nuances de la partition. L’émotion est forte dans certains passages dont le pathétique et la passion sont à leur paroxysme. La Theodora de Katherine Watson est idéale, voix de soprano modelée pour le baroque, dans sa douceur, sa précision et son velouté, aérienne et profonde. La belle Stéphanie d’Oustrac, qui incarne Irène, n’en est pas moins solaire et présente. Ces deux personnages féminins apparaissent parfaitement équilibrés par le duo Philippe Jaroussky en Didyme, tout simplement merveilleux de musicalité et de sensibilité, alliant la virilité d’engagement à l’émotion extrême de la passion amoureuse, toujours sincère, d’une profondeur vocale et théâtrale unique. A ses côtés, le ténor croate Kresimir Spicer, charpenté comme un héros wagnérien, éblouit par une technique et une puissance vocale assez fascinantes. Rien ne lui résiste, ni les imprécations martiales, ni la fureur romaine, ni la compassion chrétienne, ni le dilemme sentimental. Un chanteur surdoué qui a fait du chemin et qui n’a pas fini d’éblouir ! Mais Callum Thorpe, dans le rôle du tyran Vallens, est parfait lui aussi. N’en jetez plus, car le chef William Christie s’est entouré d’artistes de son niveau pour notre plus grand plaisir.

Hélène Kuttner

[ Crédit Photos © Vincent Pontet]

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