Piège mortel au Théâtre La Bruyère, la comédie des coups de théâtre !

On va commencer par la fin. Quand le rideau tombe, arrivent les saluts, tonnent les applaudissements. Certains spectateurs en standing ovation. Alors, s’adressant au public, un des acteurs prend la parole, il caresse nonchalamment la crosse d’un revolver et il nous prévient. Il avertit que si quelqu’un était tenté de raconter le dénouement de Piège mortel, ce serait à ses risques et périls. Rires ! 

Ce qui revient à dire que la force de cette pièce tient à ses rebondissements et qu’en conséquence elle ne se déflore pas. Le sous-titre peut en être : le théâtre des coups de théâtre. Revenons à notre affaire. 

Une maison, avec son jardin attenant. Au mur sont accrochés des objets disparates : fusil, pistolets, chaînes d’entrave, menottes, masse, corde, une hallebarde et même une arbalète. Une cheminée. Un large bureau jonché de papiers, de dossiers. Une machine à écrire. Un homme s’agite, c’est Sidney Brown, auteur à succès de pièces policières qui a connu son heure de gloire mais désormais en mal d’inspiration. Ce qui le met dans une colère et un dépit qui n’arrangent pas son naturel colérique. À ses côtés, son épouse, femme docile qui n’en finit pas de tricoter et d’entendre un mari dépité qui râle. Il tempête parce qu’un manuscrit d’une pièce de théâtre qu’un jeune auteur lui a tout juste adressé possède bien plus de qualité littéraire que sa propre imagination pourrait désormais lui offrir. Comment mettre la main sur un triomphe assuré ?

Alors, en cherchant à rendre complice sa Pénélope, il imagine un scénario terrible. Il lui faudra attirer cet auteur prometteur dans un piège… mortel !

Éventuellement pour lui proposer de co-signer son ouvrage ainsi que le lui suggère sa femme ? Plus prosaïquement… l’éliminer physiquement pour revendiquer la paternité de la pièce dont il est certain, vu sa pertinence et sa puissance, qu’elle sera le succès théâtral de l’année ? Bigre !

Vous pensez que là on vous a tout dit ? Loin s’en faut !

C’est sans compter sur de multiples rebondissements croustillants écrits pour cette version par Gérald Sibleyras, qui adapte ici le succès d’lra Levin (1800 représentations à Broadway), vrai auteur de Piège mortel. Éric Métayer, assisté de Sarah Gelle, en fait une mise en scène ingénieuse et très lisible. Enfin, Virginie Lemoine, Marie Vincent, Nicolas Briancon, Cyril Garnier et Damien Gajda, cinq comédiens au jeu précis et enlevé, nous emportent dans ce formidable thriller.

Ils explorent parfaitement les situations et semblent se délecter, eux-mêmes témoins amusés, des surprises qu’ils provoquent.

Alors, faites-vous cette promesse. Vous y allez, vous en parlez mais vous ne racontez rien.

Certainement un des meilleurs polars de la saison à l’affiche des théâtres privés parisiens.

Patrick duCome

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[Photos © Lot]