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Isabelle Le Guen : “Peindre, c’est refuser d’être enfermé”

1 juin 2020
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© Jean de Lauzières

Rencontre avec Isabelle Le Guen, une artiste peintre rochelaise qui nous parle de ses œuvres et de son parcours extrêmement riche. Elle nous invite ici dans les coulisses de ses ateliers, au cœur de son inspiration. 

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ? 

Artiste peintre rochelaise de naissance et de cœur, j’ai fait de ma passion de toujours mon métier. En effet, la peinture et moi c’est une longue histoire d’amour : déjà à huit ans, je m’entraînais inlassablement à peindre des tournesols (devinez de qui ?) et découpais dans les encyclopédies de mon père, toutes les images de La Joconde pour essayer de les reproduire. Quarante ans après, je tente toujours d’en percer les mystères ! Amoureuse des matières et des couleurs, ma pratique de plusieurs techniques donne à mes œuvres un caractère urbain. De la plus petite toile aux fresques murales, chaque support est une page blanche sur laquelle je pose mon inspiration, sans cesse renouvelée.


En quoi consiste votre métier, ainsi que vos différentes missions ?

Être artiste peintre, c’est réinventer la réalité à travers ses créations et ses expérimentations. Cette mission est une quête sans fin, une vie n’y suffit sans doute pas.
Ma mission, c’est aussi de mettre des couleurs dans le cœur des gens… Portraits d’artistes, de particuliers ou animaliers sur toile, paysages de bord de mer aux accents iodés, sont autant de thèmes qui prennent vie sous mes pinceaux, truelles et couteaux, alternant entre l’huile, l’acrylique, les encres, l’aérosol et les pigments. Cette passion, il me plaît aussi de la partager sous forme d’ateliers adaptés à tous les âges et à tous les niveaux. J’interviens régulièrement pour des groupes scolaires, des maisons des jeunes ainsi que dans les résidences séniors et pour de l’événementiel. Dans ces moments riches d’échanges, technique et histoire de l’art se distillent dans une ambiance joviale, propice à la création.

D’où vient votre inspiration pour vos œuvres ? 

Fascinée par le tout premier peintre, celui qui posa sa main en positif sur le mur d’une grotte, j’ai exploré dès mon plus jeune âge, l’art dans ses mouvements principaux depuis le pariétal. De l’école flamande à l’impressionnisme, je voue une admiration sans bornes pour ces artistes qui firent l’Histoire à la lueur d’une bougie et y laissèrent souvent la vie, si ils n’y perdirent pas leur âme… La découverte du fauvisme, de l’impressionnisme et du pop art me donnèrent les clés de la pratique des couleurs et l’amour de leurs lois.
Mes sources d’inspiration sont donc autant l’art que les artistes. Je suis aussi une amoureuse du 7ème art et une fervente mélomane. Redonner vie sur mes toiles aux visages de ces hommes et de ces femmes est comme leur rendre un hommage en couleurs sans note finale ou clap de fin.

Pouvez-vous nous parler un peu de votre parcours ? 

Sans vous faire tout mon curriculum vitae, après avoir étudié l’italien à l’Université, j’ai travaillé en équipe dans le monde de la vente et de la communication mais dès cette époque, tout mon temps libre était dédié à la peinture et à des expositions de mes premières œuvres à travers la France. Au fil des demandes qui se firent de plus en plus pressantes, j’ai décidé de franchir le pas et de faire à jamais de mes pinceaux et de ma salopette maculée d’acrylique, mes outils de travail. La création de mon atelier d’artiste peintre, couplée avec mon activité d’animatrice artistique autour de La Rochelle, correspond à la fois à mon ancrage atlantique et à mon vif intérêt pour les dynamiques urbaines actuelles. En tout cas, la peinture qui était ma passion s’est véritablement imposée comme mon métier.

Décrivez-nous votre style en quelques mots.

Comme il est compliqué de le définir ! Picasso disait d’ailleurs : “Dans le fond, je suis peut-être un peintre sans style… Le style, c’est souvent ce qui enferme le peintre dans une même vision, une même technique []“. Créer, c’est trouver la liberté. Peindre, c’est refuser d’être enfermé.

Qu’est-ce que vous préférez, l’inspiration et la création dans vos ateliers ou la présentation dans la galerie et la vente ? 

Quand on entre dans l’atelier, on entre en peinture. L’inspiration ne se commande pas, elle se révèle à l’artiste. Elle décide de l’heure, elle décide du temps, du comment, de quoi !
Du point de vue du peintre, qui n’est pas vraiment seul car animé par ses idées, on a parfois l’agréable surprise de l’accident et du chaos, ou de la “blue note” qui ne vient que lorsque la technique, l’instinct et l’énergie arrivent à leur point de fusion. Si la toile est mon support de prédilection, toute surface où poser les pigments m’intéresse. Ainsi, bois, pierre, lin, sur lesquels explosent acrylique, huile, plâtre et enduit sont pour moi à modeler avec ou sans apprêt ou technique mixte, selon l’inspiration et le sujet. La présentation en galerie ou la vente, c’est le grand jour. Les toiles quittent l’atelier et sont partagées au monde, elles vivent ensuite leur vie d’œuvres adoptées par leurs propriétaires et suivent leur destin, au fil du lien tissé pour elles par l’involontaire complicité de leur créateur et de leur acquéreur. Ce que je préfère, c’est savoir que toute vente signifie qu’une nouvelle toile va voir le jour. C’est le meilleur de la vie d’artiste peintre que de voir ce mystère se renouveler.

© Jean de Lauzières

Vous avez aussi des projets internationaux, pouvez-vous nous en parler ? 

Oui, restons à Jersey alors ! J’y développe plusieurs projets artistiques et pas seulement mon exposition permanente à la Harbour Gallery de Saint-Aubin. Le prochain événement sera l’animation d’ateliers artistiques pour un public anglophone, ainsi qu’un vernissage à l’Alliance Française de Saint-Hélier. Parallèlement à ces manifestations, j’anime une chronique artistique dans les colonnes du seul journal francophone d’outre-Manche, “Le Rocher” où, à l’instar de Victor Hugo, illustre exilé, j’explore des territoires inconnus sous le sobriquet du “pinceau voyageur”.

Quel projet vous a le plus marqué ? Pourquoi ? 

Invitée il y a tout juste cinq ans en tant qu’artiste peintre par une association de graffeurs rochelais pour un événement sur trois jours, j’ai réalisé cette fresque géante de Jimi Hendrix au Gabut. Je découvrais pour la première fois un espace de plusieurs mètres de haut qui m’était réservé et des cartons remplis de sprays multicolores qui devaient remplacer pour une fois mes tubes et mes pinceaux. Au pied du mur, je ne pouvais reculer que pour jauger l’espace que j’avais à recouvrir de mon inspiration. Décapsulant ma première bombe en ignorant qu’elle possédait une sécurité, déclenchant en revanche les sourires voisins, je m’élançais, ne connaissant rien à cette technique. Deux jours après, à la fin de ce festival de graffiti, je contemplais épuisée mais apaisée l’œuvre surgie de cette première confrontation avec l’art urbain. Le lendemain dans le journal, le célèbre festival se voyait illustré de mon premier graffiti : “HENDRIX RENAÎT !”. Cette aventure street art m’amena rapidement à d’autres réalisations sur des supports industriels ou du mobilier public, ainsi qu’à la customisation d’anciennes cabines téléphoniques reconverties en boîtes à livres : fidèle à ma vision de l’art en partage ! Mais comme je le dis souvent, le plus beau des projets est celui à venir…

© Philippe Monois

Où pouvons-nous nous procurer vos œuvres ? 

Vous pouvez visiter mon univers artistique et voir mes œuvres sur mon profil Facebook et sur ma page intitulée “Couleurs de swing”. Par ce biais, vous pouvez communiquer directement avec moi et accéder à une galerie en ligne de toutes mes toiles, ainsi qu’à mon actualité. Je précise que je vends mes œuvres, commandes et créations en direct, je communique avec mes clients et procède personnellement aux emballages, expéditions ou livraisons. En outre, des professionnels de l’art m’honorent de leur complicité en France et à l’étranger, en exposant mon travail à travers l’Europe et sur le continent américain. J’ai notamment le plaisir d’avoir pour partenaire durable un galeriste d’exception en la personne de Bruno Hamelin, gérant de la galerie d’art internationale Art 21, nichée au cœur de Montmartre – 27 rue Tholozé, 75018 Paris. Je suis également présente outre-Manche sur l’île de Jersey, à la Harbour Gallery de Saint-Aubin, où Pat Robson expose mes deux styles de prédilection : mes portraits pop art constellés de pigments or ou structurés par de puissantes couleurs complémentaires ainsi que mes bords de mer abstraits aux horizons mystérieux.

Avez-vous des projets futurs dont vous pouvez nous parler ? 

Bien sûr ! Comme j’adore l’Italie, berceau des maîtres de l’art pictural et que j’en parle la langue, j’y vends régulièrement des œuvres mais serais honorée d’y être exposée. J’ai également beaucoup de clients en Belgique, que j’adore, qui me sollicitent pour exposer chez eux, cette perspective m’enchanterait. En attendant, vos projets étant aussi les miens, je suis à l’écoute de vos commandes et suggestions au 06 81 12 79 19.

Propos recueillis par Justine Mailhe

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