Bronson
Un opéra pop
D’une narration réduite au maximum, il focalise son récit sur la nature ambivalente de Michael Peterson. Exit donc les effets dramatiques et les justifications morales. Son “héros” n’est pas l’enfant monstrueux d’un trauma familial, mais simplement la résultante d’une colère tapie sous le vernis d’une middle class lénifiante. Evacué en l’espace de quelques plans, l’ « historique » de Michael Peterson laisse donc place aux exactions de son double, Bronson, adepte du corps à corps. Et sans concession, Nicolas Winding Refn filme ces ballets sanglants, soutenus par un score épique invoquant la marche funèbre de Wagner. La violence, bien que magnifiée par la caméra fétichiste du réalisateur, est immédiatement désamorcée par des ellipses absurdes renvoyant au caractère irrationnel des protagonistes. On pense alors au lyrisme morbide d’Orange Mécanique et à l’érotisation du mal déjà éprouvée chez Kenneth Anger. A l’opposé du style quasi naturaliste des Pusher, Nicolas Winding Refn réalise un opéra pop, usant de contre-plongées iconiques et de séquences d’animation.
L’anti « Hunger »
Mais le film est surtout une variation brutale du Vol… de Milos Forman. En narrateur omniscient, Bronson orchestre une accumulation de saynètes illustrant son glissement progressif dans la schizophrénie. Dès l’épilogue, il se présente en Groucho Marx inquiétant devant un théâtre imaginaire en contrechamp. Composé comme un anti “Hunger”, le dernier film de Nicolas Winding Refn bouscule la représentation traditionnelle de l’enfermement carcéral. Ici la prison est une scène, les codétenus, des spectateurs. Un jeu de faux-semblants qui s’achève dans un climax radical où Bronson reproduit sur le corps de sa victime un tableau de Magritte. Et la tension, latente depuis les premières images, de trouver son paroxysme.
Romain Blondeau
[embedyt] https://www.youtube.com/watch?v=Oty72584I4E[/embedyt]
Bronson
De Nicolas Winding Refn
Avec Tom Hardy, Matt King
Sortie le 15 juillet 2009
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