L’Homme fidèle – un film de Louis Garrel
Pour son second film comme réalisateur, Louis Garrel nous fait vivre les pérégrinations amoureuses d’un jeune homme dans le Paris contemporain. Sobre et brillant.
Des amours tourmentées
C’est une histoire d’amour qui commence par une scène de rupture : Marianne, une Laetitia Casta magnifique dans son embarras, annonce à Abel, campé par Louis Garrel, qu’elle est enceinte. Oui, seulement voilà, pas de lui : non, de Paul, son ami. Ils se marient bientôt. Désolée.
Le temps passe. Paul meurt. L’enterrement réunit les anciens amants, qui se retrouvent et vivent enfin leur amour interrompu. Mais deux personnages viennent troubler cette fête : Joseph, le fils de Marianne, qui prétend que celle-ci a tué son père, et Eve, la sœur de Paul, jouée par une Lili-Rose Depp charmante, qui n’a de cesse de conquérir le cœur du rival de son frère. Comment survivre à tous ces obstacles ?
Entre bluette et film policier
Entre histoire d’amour et film policier, L’homme fidèle fait le pari du mélange des genres : à l’instar d’Abel, on finit par se demander si Joseph n’a pas raison, si Marianne n’a pas tué Paul. Ce personnage apparaît ainsi comme une figure du destin, mais aussi comme celle de la quête : quête d’amour, face à cette mère aimante mais qui risque de le délaisser pour cet ancien-nouvel amant, quête de vérité dans ce monde où tous les adultes mentent. Car ils mentent tous, tout le temps : c’est à ce prix qu’ils parviennent à défendre leur bonheur précaire.
Alors, pour se défendre à son tour, Joseph bâtit son propre mensonge. Ou, plutôt, un fantasme : celui de cette mère meurtrière, qui doit pouvoir éloigner Abel. Mais il est aussi celui par qui, grâce à un enregistreur qu’il place sous le lit de sa mère, la vérité éclate : les médiocres ébats des nouveaux amants, leurs stratégies pour permettre à leur couple de durer. Tel un Tirésias moderne, Joseph est un messager des malheurs.
Un mélange des genres assumé
Car les allusions à Œdipe sont légion dans ce mythe contemporain : le rapport pour le moins incestuel de Joseph à Marianne, qui pense connaître tous ses amants, la question du meurtre familial, la forme de l’enquête… Les réminiscences de Sophocle sont bien présentes. Et, comme chez Sophocle, Louis Garrel et Jean-Claude Carrière resserrent la narration autour de quelques personnages et quelques moments forts.
La gravité du mythe est toutefois nuancée par la légèreté du ton. Souvent portée par l’enfant, elle apparaît aussi dans les propos de l’obsédante voix off, dont le contraste avec l’image prête parfois à sourire. Quant à l’onomastique, elle nous invite elle aussi à hésiter entre mythe et comédie, avec le fort lot de prénoms bibliques (Josephe, Eve, Abel), et celui de Marianne, qui n’est pas sans rappeler certains caprices. Et, comme chez Musset, il semblerait que ce soit la légèreté du marivaudage qui tue. Un film à la croisée des genres et des sources.
Julia Wahl
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