Le radeau de la Méduse, naufrage de l’humanité
Le Radeau de la Méduse De Georg Kaiser Mise en scène de Thomas Jolly Avec Youssouf Abi-Ayad, Éléonore Auzou-Connes, Jusqu’au 30 juin 2017 20h du mardi au samedi / 15h le dimanche Tarifs : 8 à 36 euros Réservation par tél. au 01 44 85 40 40 Durée : 1h45 Ateliers Berthier – Odéon Théâtre de l’Europe |
Jusqu’au 30 juin 2017 Treize enfants sont sur une chaloupe à la dérive : le drame, qui rappelle celui du Radeau de la Méduse au 19e siècle, est inspiré d’un fait réel de la seconde guerre mondiale, celui du torpillage d’un navire anglais qui éloignait les enfants du largage des bombes. Tout le spectacle se déroule en un long tableau unique, celui du petit bateau perdu sur la mer et dans les brumes. Seules la lumière et la lente rotation de l’embarcation sur elle-même créent un mouvement, mais aussi infimes qu’elles soient, ces variations soigneusement élaborées opèrent en une véritable magie picturale. Bien qu’on ne sorte quasiment jamais d’une demie-pénombre, la perfection des éclairages et l’extrême rigueur des déplacements des enfants sur le bateau, captivent par l’esthétique réalisée. Les tonalités de gris et de bleu foncé qui dominent, renforcent le sentiment de désolation face au naufrage et à la mort attendue au milieu du silence marin. Cet aboutissement formel résulte de la rencontre entre le jeune et célèbre metteur en scène Thomas Jolly et les comédiens issus de l’école du Théâtre National de Strasbourg. Cette belle équipe, voulue initialement par le directeur Stanislas Nordey, pose également avec maestria le propos métaphorique de la pièce, celui du comportement humain face à une situation extrême de danger. Les six garçons et les six filles présents s’interrogent sur la conduite à tenir pour se donner toutes les chances de survie et c’est autour de la question de Dieu que leurs décisions s’articulent. Tous éduqués dans une morale chrétienne, ils s’affrontent quant aux interprétations bibliques d’autant plus qu’il sont 13, le chiffre porteur de malédiction entrainant une mesure de représaille tragique envers le plus faible. Finalement, malgré le sauvetage tant espéré, c’est le naufrage de l’humanité que décrit l’auteur Georg Kaiser.Les méthodes employées, les sacrifices consentis, transforment les rescapés en de sombres témoins d’une humanité première engloutie. L’enfance a disparu et avec elle ce que les hommes portaient de mieux. L’auteur allemand, né en 1878 et mort en 1945 en exil en Suisse, a écrit cette pièce en pleine guerre. Lui-même poète et dramaturge tourmenté face à la société répressive et violente, a connu largement le succès mais aussi et surtout une profonde solitude Emilie Darlier |
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