“Les Parallèles” : comédie romantique douce amère sur la difficulté à se rencontrer
© Pascal Gely
À l’heure du speed dating et de la multiplication des sites de rencontres, Alexandre Oppecini imagine une rencontre entre deux êtres que tout oppose, sur le pas d’une porte qui devait s’ouvrir sur une fête de crémaillère avec des amis de collège. Deux comédiens pétillants, Marie-Pierre Nouveau et Benjamin Wangermée, nous embarquent dans la sève d’une écriture à la fois crue et poétique, délirante et coquine. Une belle surprise.
Les parallèles ne se rencontrent jamais
Elle, c’est une jeune femme accomplie, dynamique et ambitieuse. Le corps moulé dans une robe noire plus que sexy, perchée sur des talons vertigineux, cette créature de rêve n’a pas une minute à perdre dans un planning surbooké, sauf justement les quelques secondes qui la surprennent, interdite, à découvrir l’hurluberlu pas très désirable qui lui fait face sur ce palier d’escalier. Lui, dont le regard ne cesse de fuir, se trémousse de timidité et de nervosité. Le bonheur l’a depuis longtemps abandonné à son triste sort de célibataire dépressif, sa compagne l’a quitté, le Covid l’a privé de travail. Ce looser romantique, qui déclame des alexandrins au lyrisme enflammé pour ne pas sombrer dans l’alcool, fait d’abord tout pour repousser l’attirance qu’il ressent pour la jeune femme. Contre toute attente, cette dernière prend cette victime sous son aile. Et on apprend progressivement, derrière le choc des contraires, que ces deux-là ont davantage de points communs que ne laissent présager les apparences. Le premier point commun est justement celui qui unit ces deux solitudes : la difficulté à nouer une relation, à s’ouvrir patiemment à l’autre.
Un conte cruel et féérique
Alexandre Oppecini a écrit un duo étonnant, mélange de réalisme cru et de poésie lyrique, qu’il tisse avec talent entre ces deux personnages qui sont comme le soleil et la lune. La communication entre ces deux-là se déploie dans un beau décor en clair-obscur, autour d’un banc qui agit comme un trait d’union entre les deux pôles. La lumière enveloppe les deux acteurs avec beaucoup de chaleur. Marie-Pierre Nouveau campe avec grâce cette jeune femme à l’allure guerrière, mais au fond tendre et timide comme une petite fille qui s’empêche de vivre. Son charme félin agit comme une filtre magique qui désamorce l’aspiration au vide de son alter ego masculin. Benjamin Wangermée déploie, durant ce voyage entre solitude et carte du tendre, un démoniaque talent d’acteur, exprimant par son corps élastique toute la gamme du malheur et du bonheur, en passant par un humour et une auto-dérision dévastatrice. Grâce à eux, sous la direction de l’auteur, ces Parallèles finissent par se rencontrer dans l’infini des sensations et des aubes rêvées.
Helène Kuttner
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