Madame de Sade au Théâtre National de Strasbourg
Elles sont au nombre de six, six femmes qui ont connu ou côtoyé Donatien Alphonse François Marquis de Sade, qui l’ont aimé, adoré ou honni. Trois d’entre elles, Renée, marquise de Sade, Mme de Montreuil, la mère de cette dernière et Anne, sa sœur, ont véritablement existé, tandis que la bonne, la Comtesse de Saint-Fond, courtisane de son état, et la Baronne de Simiane, versant religieux de cette pièce, sont le fruit de l’imagination de Yukio Mishima.
Un absent omniprésent
« Sade vu à travers le regard des femmes », tel aurait pu être, l’auteur l’avoue, le titre de la pièce. Incarnant tout à tour la fidélité conjugale, l’ordre social, la moralité, la religion, l’appétit charnel ou les façons populaires, ces six femmes offrent un regard riche de différences sur un absent fondamentalement déconcertant mais toujours omniprésent. Au cœur des conversations qui mêlent candeur, naïveté, fantasme et dégoût, il habite la scène sans jamais pourtant apparaître. Nommé, décrit, critiqué mais toujours invisible, le Marquis de Sade est le septième personnage que l’on ne voit pas.
© Anne Gayan
L’histoire se déroule en trois temps et autant d’actes, que dix-huit années séparent. En 1772, 1778 et 1790, ces femmes, que tout oppose mais qu’un homme rassemble, se retrouvent dans le salon de Mme de Montreuil. A la fois prosaïques et sublimes, triviales et lyriques, elles s’affrontent à coups de verbes et de mots qui se font épée et guillotine entre les lèvres et les mains de ces guerrières.
Des créatures extraordinaires
Les crinolines qui les soutiennent et les protègent autant qu’elles-même les portent et les subissent, sont les carapaces et les carcans derrière lesquels elles se cachent et qui les emprisonnent. Pour Jacques Vincey, le metteur en scène, « le spectateur assiste [alors] à la métamorphose de ces femmes ordinaires en créatures extraordinaires, […] témoin privilégié de ces mutations spectaculaires ». Mises hors-jeu le temps de certains combats, les comédiennes, et parmi elles les brillantes Marilù Marini et Julia Vidit, retirent perruques et crinolines, retrouvant leur essence et leur fragilité, qu’elles délaissent quand elles remontent en scène.
Regards de femmes sur le Marquis de Sade, « abeille ouvrière du désir », la pièce présentée par le Théâtre National de Strasbourg, mise en scène de manière originale par Jacques Vincey, resplendit de fureur et de déraison. Sans communs ou triviaux effets de scène, elle offre une parole à ces femmes qui plongent dans l’abîme.
Solène Zores
Lire aussi sur Artistik Rezo Le Molière 2009 du créateur costumes pour Madame de Sade, de Yukio Mishima.
Madame de Sade
de Yukio Mishima
Mise en scène : Jacques Vincey, assisté d’Emmanuelle Zoll
Texte français : André Pieyre de Mandiargues (éditions Gallimard)
Scénographie : Sallahdyn Khatir
Costumes : Claire Risterucci
Lumière : Marie-Christine Soma
Musique : Frédéric Minière, Alexandre Meyer
Collaboration artistique : Paillette
Son : Frédéric Minière, Alexandre Meyer
Maquillage : Cécile Kretschmar
Avec Hélène Alexandridis, Alain Catillaz, Marilu Marini, Isabelle Mazin, Myrto Procopiou, et Julia Vidit
Du mardi 10 novembre 2009 au samedi 28 novembre 2009
Du mardi au samedi à 20 h, dimanche 22 à 16 h
Relâche : les lundis et dimanche 15
Durée : 2h20 (sans entracte)
Réservations au guichet, sur Internet, au 03 88 24 88 24
Plein tarif : de 16 € à 25 €
Tarif réduit : de 13.50 € à 16 €
Tarif spécial : 10 €
Cartes Culture / Atout voir / Demandeur d’emploi / Sapir : 5.50 €
Théâtre National de Strasbourg
1 avenue de la Marseillaise
67 000 Strasbourg
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