Bérénice Bejo, la rescapée

Née en 1976 à Buenos Aires d’une mère française et d’un père argentin, Bérénice Bejo doit beaucoup à Gérard Jugnot, dont le Meilleur espoir féminin l’a propulsée en 2000 sur le devant de la scène. Elle y incarnait Laetitia Rance, fille d’un coiffeur provincial devenant soudain une véritable star de cinéma (rebaptisée Laetitia France pour plus de glamour). Incarner une actrice en devenir pour son premier rôle important au cinéma : une jolie mise en abyme pour la jeune femme.

Son joli minois et son caractère apparemment bien trempé la destinaient à effectuer une belle carrière dans des films plutôt populaires… On se trompait totalement. Après quelques rôles passés assez inaperçus (chez Laurent Bouhnik, Marie-France Pisier, Steve Suissa), Bérénice Bejo se fait de plus en plus discrète. Sa carrière ne décolle pas. Sans doute ne fait-elle pas partie des petits papiers des directeurs de castings. Il ne faut pas grand-chose pour qu’un nom disparaisse d’une liste ou pour que les metteurs en scène n’aient pas ce désir ardent de choisir telle ou telle actrice.

À cette époque, Bérénice Bejo envisage sérieusement d’arrêter le cinéma et de faire bifurquer sa vie loin des plateaux. Sa rencontre avec Michel Hazanavicius est un double bonheur : elle trouvera un amour durable ainsi qu’un cinéaste capable de tirer le meilleur d’elle-même. Merveilleusement consternée par la personnalité du personnage de Jean Dujardin dans OSS 117 : Le Caire, nid d’espions, elle ne sera pas de la suite Rio ne répond plus pour d’évidentes raisons de scénario… mais sa présence à l’affiche de The Artist ne fera guère de doute. Retrouvant Dujardin dans ce film muet auquel personne ou presque ne croyait, Bejo décolle définitivement. Nommée à l’Oscar, qu’elle n’obtiendra pas contrairement à son partenaire, elle reçoit en revanche un César de la meilleure actrice qui la convainc définitivement qu’elle a ce métier dans le sang.

Il ne faudrait pas croire que la carrière de Bérénice Bejo se limite aux films de Michel Hazanavicius, dans lesquels elle est à chaque fois légitime et convaincante : la preuve avec sa prestation incroyable dans Le Passé, de l’Iranien Ashgar Farhadi (Une Séparation), mélodrame très fort qui lui vaut un prix d’interprétation à Cannes. Depuis, choisissant ses rôles avec parcimonie pour ne pas se brûler les ailes, Bérénice Bejo poursuit avec exigence son petit bonhomme de chemin. Il est loin le temps où le cinéma semblait la bouder pour de bon…

Lucile Bellan

[embedyt] https://www.youtube.com/watch?v=QYyWiuQ-W2o[/embedyt]

À découvrir sur Artistik Rezo : 
– Les films à voir en 2014

[Photo © Warner Bros., 2014]