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Myriam Boukrit : une artiste de la scène émergente aux Beaux-Arts de Paris

Inès Chaouachi 9 décembre 2025
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Œuvre de Myriam Boukrit © Logan Vernot

Œuvre de Myriam Boukrit © Logan Vernot

Actuellement étudiante en quatrième année aux Beaux-Arts de Paris, Myriam Boukrit est une jeune artiste pleine d’ambition qui mérite toute notre attention. Âgée de 25 ans, Myriam Boukrit est une artiste franco-marocaine issue de la banlieue parisienne. Elle parvient à intégrer les Beaux-Arts après avoir effectué la prestigieuse classe préparatoire au sein des Beaux-Arts de Paris, la Via Ferrata.

Son travail est avant tout personnel, empirique, très coloré et pop. Sa pratique est centrée sur l’intime et l’autobiographie. On peut déceler dans son art une forme d’exploration de soi notamment par son parcours de foi, sa famille, ses amis ainsi que les pratiques liées à la diaspora marocaine en banlieue parisienne. Elle centre ses thématiques autour de son enfance mais aussi beaucoup autour de la nostalgie qu’elle éprouve pour les années 2000 dans lesquelles elle a vécu et grandi. 

L’art est pour elle un exutoire, un journal intime documenté. On le constate dans sa pratique très spontanée et instinctive qui relève presque du thérapeutique. En effet, son travail se caractérise avant tout par une forte dimension narrative autour de ses voyages et de ses expériences de vie qui l’ont forgé. L’univers que Myriam convoque est enfantin, adolescent, insouciant et complètement baigné de souvenirs scolaires et d’après-midi passés à jouer à la console avec des amis en mangeant des Smarties. 

© Logan Vernot

Le médium complètement réinventé

Myriam ne laisse pas de place au vide, elle souhaite remplir tout l’espace disponible en créant une profusion et un chaos à l’aide de layering visuels et d’une superposition de matériaux divers et variés. Sa pratique maximaliste la conduit à réutiliser des matériaux de récupération comme des feuilles de papier qu’elle trouve chez des amis, des feutres, crayons de couleurs, des fluos et matériaux scolaires ou encore des craies.

L’artiste accumule les objets qu’elle trouve et qu’on lui offre car ils sont tous chargés d’une histoire et d’une symbolique forte. Cela lui permet de les réutiliser sur des compositions artistiques. Les matériaux sont accessibles et “pauvres” car de récupération, elle peut, par exemple, travailler au crayon de couleur sur des planches en bois et coller un scoubidou. 

Grâce à la récupération, on peut y voir une certaine accessibilité de l’art. Myriam Boukrit montre que nous pouvons créer avec peu et avec ce qui nous entoure au quotidien. En l’occurrence pour elle des fournitures scolaires. N’importe quel support est exploitable, les boîtes de Smarties, le Plexiglass ou encore les planches de bois en sont un exemple. Le médium est fusionné, il n’y a plus de toiles et de peinture.

Myriam procède par collage et assemblage d’éléments récupérés en brocante ou en ressourcerie. Les médiums qu’elle utilise sont multiples, allant du bois, du papier jusqu’au textile. Myriam grâce à ses médiums expérimente les textures, les dimensions et les couleurs tout en parlant de soi. La mode fait partie intégrante de son univers artistique où là aussi la récupération et l’upcycling sont au centre de sa démarche. Cet art “cheap” et accessible est assumé et Myriam arrive à nous en montrer sa richesse. La saturation et les accidents sont justement un vecteur de création. 

Sa pratique de la récupération est avant tout une tradition familiale héritée de son père lié à une vie modeste en banlieue. C’est une habitude qu’elle a conservé dans sa pratique artistique bien qu’elle ne l’ancre pas dans une dimension sociale et de classe.

Ses sujets sont néanmoins très variés bien que ces inspirations se concentrent avant tout autour de la culture populaire, des dessins animés des années 2000, des jeux vidéo mais également de cultures alternatives empreintes de multiculturalisme. Myriam arrive à aborder son quotidien, son style vestimentaire, son art et sa foi de manière ludique, joyeuse et colorée. 

© Logan Vernot

Internet et le Nostalgie core

Nous pouvons constater que cette thématique de la nostalgie est un thème fortement abordé dans le milieu Internet sous le nom de nostalgiecore. Myriam nous y donne un aperçu dans sa pratique artistique.

Le nostalgiacore est une esthétique Internet centrée sur un sentiment romantique et mélancolique de nostalgie pour un passé personnel récent, généralement lié à l’enfance des années 1990 et 2000. Cette esthétique d’Internet voit le jour sur les réseaux sociaux et notamment via le médium vidéo et photo sur TikTok et Instagram. L’esthétique n’est pas une reconstitution historique de l’époque. C’est une évocation émotionnelle et atmosphérique de la mémoire, souvent filtrée à travers les langages visuels du Dreamcore, du Weirdcore et des Liminal Spaces. 

Myriam Boukrit peut s’inscrire dans cette lignée et dans cette esthétique mais elle l’aborde surtout d’un point de vue plastique ancré dans la réalité physique de notre monde et non pas par la vidéo et la photographie.

La génération Z née entre les années 1990 et 2000 est en effet fortement sensible à cette esthétique Internet dont elle s’identifie. Il n’est donc pas étonnant que Myriam, par sa pratique purement nostalgique et autobiographique, se trouve impactée par cette esthétique caractéristique.

Dans une société d’après Covid où l’intelligence artificielle et l’instabilité géopolitique mondiale inquiètent et interrogent. La génération Z se réfugie donc dans la nostalgie d’un monde où l’Internet utopique qu’il nous était promis dans les années 2000 semble un lointain souvenir.

© Lydia Matiegou-Keïta

Instagram de l’artiste : @fi3rdetrep0vre

Inès Chaouachi

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