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“Notre Dame de Paris”, un spectacle merveilleux pour les fêtes

Hélène Kuttner 10 décembre 2025
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©Yonathan-Kellerman-OnP

La belle Egyptienne Esmeralda, le bossu Quasimodo, le diabolique Frollo et le rayonnant Phœbus, tous les héros du roman de Victor Hugo se retrouvent sur le plateau de l’Opéra Bastille, avec la foule parisienne, dans des costumes d’Yves Saint-Laurent, des décors de René Allio et une partition musicale de Maurice Jarre.  Créé en 1965, « Notre Dame de Paris », ce ballet chorégraphié par Roland Petit, est une merveille totale, visuelle et sonore, que l’on peut voir à tous âges et qui est un spectacle idéal pour ce mois de fêtes.

Bouffon et tragique à la fois

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Comment mêler une histoire bouffonne et tragique à la fois, emplie de personnages sombres et de conflits, qui se déroule dans un Moyen-Age médiéval et chrétien, et une histoire d’amour entre un sonneur de cloches difforme, Quasimodo, et une torride Egyptienne qui l’ensorcelle, dans un ballet moderne à l’esthétique colorée et tranchante ? Roland Petit (1924-2011) danseur de l’Opéra de Paris et chorégraphe boulimique, passionné par tous les arts du spectacle, travailleur infatigable, est parvenu avec cette création à fusionner le drame passionnel de Victor Hugo avec la bouffonnerie des personnages, le dessin précis de personnages principaux emblématiques et le mouvement bigarré des foules de mendiants de Paris en un ballet flamboyant et renversant, coloré comme les vitraux d’une cathédrale, cruel et poétique comme l’est la prose de Victor Hugo. Il faut dire qu’Yves Saint-Laurent en personne, passionné par la modernité du projet, créa pour l’occasion des costumes aux couleurs vives de Mondrian, structurés en tuniques courtes et corsets lacés de noir, tenues au style incroyablement efficace qui donnent à la production des allures de fête mystique.

Un régal de danse

©Yonathan-Kellerman-OnP

Dans un premier tableau saisissant, en l’an de grâce 1482, le peuple de Paris, bourgeois et mendiants, célèbrent la Fête des fous en rivalisant de pitreries et de grimaces les plus fantasques pour enlever le titre de « Pape des fous ». Les cloches et les clochettes en harmonie se déchaînent dans l’orchestre et introduisent subtilement la partition flamboyante de Maurice Jarre, gorgée d’influences mélodiques de Debussy, de Varèse ou de Messian. Le décor ombré d’une géométrie en noir et pourpre de René Allio dessine une ambiance d’un mysticisme ardent, vitraux poudrés de ténèbres qui annoncent le plus profond des drames. Et voici la danse, habitée et théâtrale, stylisée à outrance, du peuple de Paris qui apparaît comme une armée de marionnettes survoltées. Jambes écartées à l’horizontale, corps vivaces avec des bras et des mains qui dansent en permanence, tendues, écartées ou en forme de bouclier, les danseurs en ligne, comme sur des ressorts, déploient dans des costumes multicolores un enchainement hypnotique et enivrant. Survient Quasimodo, qu’incarne de manière stupéfiante un Hugo Marchand méconnaissable, les joues creusées, l’épaule droite surélevée et le bras à l’équerre.

Ange et démon

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Est-il un ange ou un démon, ce sonneur de cloches difforme que le splendide danseur étoile campe avec une théâtralité habitée ? Toujours est-il que son maître Frollo, archidiacre de Notre Dame, vient rappeler à tous que la vie n’est pas faite que de plaisir et fait rentrer Quasimodo d’un geste du bras. Pablo Legasa, dans la première distribution, insuffle à ce personnage diabolique une sécheresse d’acier, une férocité infernale. Alors qu’Esmeralda apparaît, magnétique, dansée par l’étoile Amandine Albisson, d’une grâce et d’une élégance impériales, Frollo intime à Quasimodo de poursuivre la jeune femme qu’il aime d’un amour insensé. Mais c’est oublier le joyeux capitaine Phœbus, interprété par Antonio Conforti, qui sauve Esmeralda de la potence et finit par l’emporter dans ses bras de héros vaillant. Ici encore, le rythme trépidant de la musique, avec un orchestre dirigé brillamment par Jean-François Verdier, déploie ses images cinématographiques avec cymbales, castagnettes et percussions tandis que la poésie de Jean Cocteau colore d’une ironie douloureuse les mimiques et la pantomime brisée de Quasimodo. Les duos amoureux avec Esmeralda, danse acrobatique d’une folle sensualité, d’une simplicité graphique surprenante, nous laissent aussi un inoubliable souvenir. Quel beau spectacle !

Hélène Kuttner  

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