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Oeuvre-capsule à louer

8 avril 2010
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Dans un décor seventies vert-bleuté, et un design retro-futuriste, l’Hôtel Everland est doté de tout le confort qui sied aux palaces et aux plus grands hôtels. Un vaste lounge agrémenté de sofas profonds, un lit-double, un salon de bain magistral, un mini-bar garni de champagne, la wi-fi et le petit déjeuner au lit… mais aussi un pickup et des vinyles, comme à la maison. Cette capsule hors-temps de 35 m2 met des vues imprenables à la portée de ses clients grâce à son hublot géant qui encadre les paysages vers lesquels il tend.
Après s’être posé à Yverdon-les-Bains et à Burgdorf en Suisse, puis à Leipzig en Allemagne, l’Hôtel Everland est en ce moment-même en stationnement sur le toit du Palais de Tokyo pour une durée exceptionnelle d’un an.  Ses fondations ont été bâties à Everland, un lieu qui ne se localise sur aucune une carte et qui a été imaginé par le commissaire d’exposition Gianni Jetzer lors de l’Exposition Nationale Suisse de 2002. Résultat : une œuvre d’art à habiter et qui peur se louer comme une véritable chambre d’hôtel. Alors que la Seine nous ouvre ses bras et que la Tour Eiffel est si proche qu’on la prendrait volontiers pour un bibelot, le duo Suisse Lang/ Baumann, les créateurs de ce cocon seventies qui domine les toits de Paris et dont l’adresse exacte se passe sous le manteau, répondent à nos questions. 

Pourquoi un hôtel en guise d’œuvre d’art?
Parce que c’est à la fois un lieu très privé et très public puisqu’on le partage avec d’autres.
Pour beaucoup de gens, l’idée de séjourner à l’hôtel est quelque chose d’inhabituel et de spécial. En même temps, la très forte standardisation des hôtels les a rendu sans surprise pour la plupart. Rien n’y est très personnel, ni dans le design, ni dans les services offerts.
On a voulu créer un espace différent, équipé de détails plus personnels comme le tourne-disque et les vinyles par exemple. Une pièce réellement unique, un prototype qui ne pourrait être ni dupliqué ni standardisé.
C’est vraiment notre vision subjective, en tant qu’artistes, de la chambre d’hôtel idéale.
Et puis, on offre très souvent aux visiteurs de nos expositions la possibilité « d’utiliser » notre travail. C’est pour nous comme une manière de l’engager physiquement. Il est alors plus simple pour lui d’avoir une réflexion, de réfléchir à la « fonction » de l’art.

L’immense fenêtre encadre une vue imprenable. Quelle vision de Paris avez-vous voulu donner à travers cet hôtel?
On ne se considère que comme des invités avec ce projet. L’Hôtel Everland a été conçu pour se déplacer et son immense fenêtre est là pour laisser le paysage extérieur fusionner avec l’espace intérieur… ce n’est pas non plus une capsule isolée qui pourrait se trouver n’importe où, sur la Lune ou ailleurs.
La vue, c’est toujours quelque chose d’intéressant. Bien sûr, dans Paris, ça devient « beau » au sens classique mais aussi touristique, mais elle l’était tout autant à Leipzig où nous l’avons aussi présenté.
Ce qui nous intéressait, c’était le Palais de Tokyo en tant qu’institution d’art à la lisière de l’art et de la vie. C’est un lieu vraiment vivant avec beaucoup de passage. 
Il a aussi le fait que cet édifice, tout comme la Tour Eiffel, a été construit pour une des Expositions Universelles : cette construction est une sorte de constat visuel d’une époque…

Comment avez-vous choisi l’emplacement de l’Hôtel, sur le toit du Palais de Tokyo ?
Everland doit être placé dans un lieu où l’intérieur n’est pas visible de l’extérieur. Il ne pouvait donc pas être installé au niveau de la rue. Si on a choisi le toit, c’est aussi parce qu’on aime l’idée qu’il s’agit d’une zone inaccessible en temps normal. Ça devient comme une extension du musée.

D’où vient cette fascination pour l’esthétique des Années 70 ?
Comme elle est familière au spectateur, cette esthétique lui permet d’atteindre un autre niveau.
On aime les fortes connections qui existent dans les années 60-70 entre l’art, les sciences et le design, l’utopie qui traverse cette époque et la croyance naïve dans le futur.
On aime ses couleurs vives, ses matériaux particuliers et la forte expérience physique que l’on peut entretenir avec eux. La moquette en est un parfait exemple : c’est doux, ça crée une très bonne acoustique, il est possible d’en recouvrir les murs, les plafonds, le sol, et même les meubles… on peut donc traiter une pièce comme une seule et même surface. C’est bien un certain temps, puis ça devient laid… ce qui en fait aussi un gage de qualité à nos yeux.

Qui sont les résidents de l’Hôtel Everland ?
Pour la plupart, ce sont des Parisiens ! Il semblerait qu’il n’y ait pas beaucoup de lieux où l’on puisse s’installer et s’offrir une telle vue sur la ville. Et ils ne font pas qu’y dormir. Ils viennent ici passer le temps, de 18h à minuit, et c’est ce qu’ils apprécient. Ils viennent juste s’installer ici, prendre un verre, écouter de la musique et admirer la vue. Il n’y a pas de high-tech, pas de vidéo, pas de TV… en réalité, c’est une chose simple de rendre les gens heureux. Ils sont conscients de ce qu’on leur offre : pas seulement du temps mais aussi la possibilité d’expérimenter une œuvre dans la plus grande intimité, dans un cadre différent d’une architecture conventionnelle ou d’une pièce de design.

Pourquoi avoir placé une webcam dans cet espace? Est-ce que les clients de l’hôtel deviennent à leur tour une œuvre d’art ?
La Webcam ne montre pas les invités de l’hôtel, elle se contente de signaler leur présence. Il n’a jamais été question d’un projet voyeuriste. Mais évidemment, les visiteurs font partie de l’œuvre quand ils séjournent dans la pièce et ils sont conscients de participer à un projet artistique.

Propos recueillis et traduits de l’anglais par Anaïd Demir
Paris, 2007

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