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Dorothée de Cabissole : “Tous danseurs c’est un endroit où l’on entend des paroles rares”

Sophie LE SAINT 18 janvier 2022
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Dorothée de Cabissole se décrit comme une amoureuse du beau et du mouvement, une passionnée de danse qui aime saupoudrer sa vie de soleil. Son podcast “Tous danseurs” fêtera bientôt ses deux ans et pour l’occasion, nous avons cherché à en savoir un peu plus sur sa vision de la danse, le podcast et ses projets pour faire évoluer celui-ci.

Tu as créé un podcast dédié à la danse, quel est ton rapport à cette discipline ?

La danse est en moi depuis l’enfance, je fais partie de ces petites filles qui ont rêvé d’être danseuse. Elle a toujours été dans ma vie, parfois j’étais moins présente dans la danse mais j’y revenais. Puis il y a trois ans, après une vie professionnelle assez conventionnelle et plutôt réussie, j’ai eu envie d’entreprendre et j’ai tout de suite eu une sorte de flash. Je me suis dit : “Je vais faire un truc autour de la danse”. C’était comme une évidence. Je ne sais pas si c’était un appel mais j’ai eu besoin de me mettre en mouvement et au service de la danse.

Pourrais-tu nous présenter le podcast “Tous danseurs” en quelques mots, pour donner envie à nos lecteurs qui ne le connaîtraient pas encore ?

Le podcast “Tous danseurs” c’est un endroit où l’on entend des paroles rares, à savoir celles des danseurs et des chorégraphes, ceux qui font la danse d’aujourd’hui et de demain. L’idée était d’avoir sur un même médium, toutes les danses, qu’on en parle de manière très simple et décomplexée. Que l’on puisse donner la parole à ceux qui sont dans l’ombre et à ceux qui sont dans la lumière, et que finalement, on les entende de la même manière.

Comment est née l’idée ? Quelle était la démarche derrière ce projet ?

Je voulais donner la parole aux danseurs. C’était un peu tiré par les cheveux au départ : la danse on aime la voir, est-ce qu’on aime l’entendre ? Mais je pense que moi j’avais besoin de mettre des mots. La danse je la vivais dans mon corps et j’avais envie d’entendre ceux qui la faisaient : comment ressentaient-ils la danse dans leur corps ? Comment vivaient-ils leur passion ? J’avais besoin de toucher du doigt tout ça et pour moi, ça passait par les mots.

© Violette Castex

Dans tes interviews, les danseurs disent souvent qu’ils ont du mal à s’exprimer par les mots et qu’ils s’expriment par conséquent par la danse. Toi tu leur demandes de faire le chemin inverse, c’était vraiment un pari !

Oui c’était un pari, mais je l’ai compris après. C’est suite au deuxième épisode que je me suis dit : “mais attends, ce n’est pas si évident de mettre des mots sur une passion qui est portée par le corps”. Et en fait sur la durée, je me rends compte qu’ils savent tous très bien parler de leur art. Je pense que c’est parce qu’ils sont tout simplement très authentiques par rapport à ce qu’ils vivent. Ils parlent avec leur cœur. Tout ça est dit avec beaucoup de sincérité et ça marche, ça résonne.

Pourquoi ce format du podcast ?

C’est parce qu’au départ, je suis partie toute seule. Je voulais créer un média pour donner la parole à la danse et ça me semblait être le médium le plus accessible techniquement. J’aime aussi cet outil car je trouve que c’est intéressant d’avoir ce son qui est dissocié des images de danse qu’on a l’habitude de voir. Enfin avec le podcast, j’ai l’impression de graver à jamais des témoignages d’artistes, de participer à ma petite échelle à un travail d’archivage des paroles de la danse.

Tu vas à la rencontre de nombreux danseurs, qui viennent d’univers très différents. Es-tu toujours à l’initiative de la rencontre ?

La majorité des interviews sont des interviews que j’ai ciblées. J’ai mes petites listes de rêves que je mets à jour chaque année. Et tous les ans, je pose aussi la question à ceux qui suivent “Tous danseurs”. Je leur demande qui ils souhaiteraient entendre. Maintenant, de plus en plus, je suis approchée par différentes institutions, par des lieux des arts vivants. C’est super de voir que “Tous danseurs” devient un média qui fait partie des médias cibles pour des entités de ce type. Et puis récemment, j’ai fait des partenariats avec des festivals, notamment Kalypso et Sobanova (un concours de jeunes talents chorégraphes). Et là pour le coup, je m’associe à l’événement en tant que partenaire et on va co-construire ensemble la liste des invités.

Tu invites également des professionnels qui exercent dans l’univers de la danse, pourquoi ?

Le cœur du dispositif ce sont les danseurs et les chorégraphes et entendre leurs paroles est le principe fondamental du podcast. Après, il y a ceux qui font la danse et ceux qui sont au service de la danse. C’est vrai que dès le départ, je voulais aussi mettre en lumière ceux qui participaient à la vie de la danse. Je me rends également compte que dans mon audience, il y a pas mal de danseurs en voie de professionnalisation et je me suis dit que ce serait bien que “Tous danseurs” soit aussi là pour leur apporter des outils. C’est d’ailleurs quelque chose que j’aimerais travailler davantage dans la ligne éditoriale de 2022.

Justement, cela fait deux ans que tu as lancé le podcast “Tous danseurs”, comment souhaites-tu le faire évoluer ?

Oui, ça fait deux ans tout pile ce mois-ci, à raison d’un épisode par semaine. J’ai forcément envie de le renforcer, mais j’ai aussi envie de créer d’autres choses. Notamment un site qui ne serait pas juste un site vitrine mais aussi un site d’information. C’est en cours de construction. J’ai l’envie d’engager une communauté de journalistes en herbe qui écriraient sur la danse, ce qui me permettrait de faire vivre la passion de la danse à d’autres personnes. Que du podcast, on passe à un média “Tous danseurs” beaucoup plus large qui ne soit pas cantonné qu’au son mais qui soit pluridisciplinaire. Des idées, je n’en manque pas, après c’est le temps qui me manque !

© Frédérique Calloch

Que t’a apporté le podcast ?

Je me sens très chanceuse d’être à cette place. Je rencontre des gens extraordinaires et je touche du doigt le beau. Je me sens remplie de ces mots que j’ai engrangés, beaucoup plus riche de tous ces témoignages, de cette confiance. J’ai commencé sans objectif particulier. Je voulais faire quelque chose de bien, avec beaucoup d’exigence, et je suis assez contente de voir le parcours que j’ai pu accomplir. J’espère que ça va continuer et que l’élan qui me porte va être maintenu.

Qu’aimerais-tu pour la danse ? 

J’aimerais qu’elle soit comprise et que toutes les formes de public aillent voir la danse, que les gens aient de la curiosité pour la danse sous toutes ses formes et dans différents lieux : des scènes ouvertes, pas que des lieux prestigieux. Après, j’aimerais que les danses se parlent davantage. C’est en bonne voie mais j’ai l’impression qu’il y a encore des mondes un peu cloisonnés et que tous ces mondes mériteraient de s’ouvrir les uns aux autres pour se nourrir. Il faut aller voir la danse, il faut s’y intéresser, il faut juste la vivre en fait !

Pourquoi le podcast s’appelle-t-il “Tous danseurs” ?

On porte tous un petit bout de danse en nous, de manière consciente ou inconsciente. Ça va au-delà de la danse d’ailleurs, on doit tous être danseurs de sa vie.

Et enfin, as-tu quelques recommandations danse à nous partager ?

Le Bal de Paris, de Blanca Li. C’est une expérience immersive dans un monde virtuel, c’est très spectaculaire, folie technologique ! Les créations de Mourad Merzouki :  PixelZéphyr, Folia, etc… Le Grand Sot, de Marion Motin également. Et à partir de février au 104, foncez voir Leïla Ka, un seul en scène d’une intensité rare. Il y en a plein d’autres mais là c’est ce que j’ai en tête dans les actus courtes. Il y a plein de belles choses et on a des lieux d’exception qui mettent en scène la danse.

 

Retrouvez le podcast “Tous danseurs” sur Apple Podcast.

Propos recueillis par Sophie Le Saint

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