Festival Avignon Off 2025 : Coups de cœur danse et théâtre
"Le Dernier jour de Pierre" © S. Gutwirth
Pour sa 59e édition, le festival Off d’Avignon aligne plus de 1 700 spectacles, l’occasion de voir ou revoir des valeurs sures et de découvrir des artistes émergents. Théâtre, danse, cirque, marionnette, chant… toutes les disciplines du spectacle vivant sont représentées. Retour sur quelques beaux moments.
Le Dernier jour de Pierre de Baptiste Zsilina
Créée par Baptiste Zsilina et sa compagnie basée à Avignon, cette pièce de théâtre de marionnettes, sans parole, invite à suivre un homme dans son dernier jour : Pierre arrive dans un petit village provençal sous la neige, croise une famille qui lui offre l’hospitalité, un musicien ambulant, des couturières, un chat… Les tableaux se succèdent, entrecoupés de ce que l’auteur appelle des “brèches horrifiques”, intermèdes à l’esthétique effrayante qui figurent, entre autres, un spectre ou une silhouette évoquant une charogne. Est-ce cela qui hante l’esprit de Pierre ? Ou bien l’annonce de l’issue fatale ? Les marionnettes et les décors sont réalisés avec une incroyable précision que les spectateurs sont invités à découvrir avec des jumelles proposées à l’entrée. La dernière brèche figure un cœur transpercé. Pierre s’est-il suicidé ? A-t-il été tué ? Tout au long de la pièce, le personnage n’est apparu ni triste ni désespéré mais exceptionnellement apaisé et ouvert à l’autre, comme s’il souhaitait savourer chaque rencontre, chaque instant au centuple. Il se dégage de cet univers singulier une beauté étrange et surtout beaucoup de poésie.
Le Dernier jour de Pierre de Baptiste Zsilina, compagnie Deraïdenz
Du 5 au 19 juillet au Théâtre du Train Bleu / Pôle culturel Jean Ferrat à Sauveterre
Macéra de Fouad Kouchy et Youssef Bel Baraka
Macera signifie Odyssée en turc et c’est bien à une évocation du voyage que nous invitent les chorégraphes. Les danseurs s’amusent avec leur sac à dos qui devient un véritable élément chorégraphique, un solo nous transporte dans une veillée au coin du feu et le duo final nous rappelle que les voyage sont autant d’occasion de rencontres. Fouad Kouchy et Youssef Bel Baraka ne se limitent pas à une succession de solos virtuoses – même s’il y en a pour le plus grand bonheur des amateurs de break-dance – mais utilisent le hip-hop pour construire des images qui permettent à chacun, selon son expérience du voyage, de se projeter dans ses souvenirs ou son imaginaire.
Macéra de Fouad Kouchy et Youssef Bel Baraka, Compagnie Pyramid
Du 5 au 26 juillet à l’espace Alya, 31bis rue Guillaume Puy

Macéra © C. Masse
Be.Girl de Valentine Nagata-Ramos
Sur une scène plongée dans l’obscurité, les cinq danseuses entrent par vague sur une musique percussive, éclairées seulement par des torches qui zooment sur leur jeu de jambe particulièrement précis et véloce. L’utilisation de la lumière servira de fil conducteur durant toute la pièce avec, à un autre moment, un travail sur les ombres portées sur le fond de scène. A rebours d’un hip-hop masculin où le défi physique prime, la finalité de la danse apparait ici dans la recherche de l’harmonie, sans toutefois renier la virtuosité. Les ensembles se forment, les corps dialoguent, se répondent, une séquence martiale laisse sa place à un solo sensuel… Avec Be.Girl – jeu de mot avec B.Girl, terme désignant les danseuses de break-dance – Valentine Nagata-Ramos propose un hip-hop au féminin, fait de puissance et d’énergie mais aussi d’une élégance certaine.
Be.Girl de Valentine Nagata-Ramos
Du 6 au 26 juillet à La Scierie, 15 boulevard du quai Saint Lazare

Be.Girl © Ville Elancourt
Le Piaf noir de Romane Minguet
Partant du fait que Barbara aurait fait la plonge à la Fontaine des Quatre saisons, cabaret où se produisait régulièrement Edith Piaf, l’auteure et comédienne Romane Minguet a imaginé ce qu’aurait pu être leur rencontre. Rigoureusement documentée, la pièce est l’occasion d’entendre des chansons de la Môme et de Barbara, impeccablement interprétés respectivement par Charlotte Marciano et Romane Minguet, mais aussi de découvrir ces deux grandes artistes parler de leur art, de leurs inspirations et, plus généralement, de la vie. La mise en scène de Jaël Galichet, Jacques Prévert sur scène, fait du spectateur le témoin de cette rencontre comme s’il était client du cabaret… Nous voici dans le Saint-Germain-des-Prés des années 50, Edith Piaf règne sur la chanson française, Barbara se révèle.
Le Piaf noir de Romane Minguet, compagnie Le piaf noir
Du 4 au 26 juillet au Rouge-gorge, 10bis place de l’Amirande

Le Piaf noir © V. Plagne
Mme Arthur fait son opéra, spectacle du cabaret Chez Mme Arthur
Cette année encore, le célèbre établissement parisien de la rue des Martyrs se délocalise à Avignon pour se frotter à l’opéra. La soirée est organisée en une succession de tableaux autour des grands tubes des arts lyrique et chorégraphique. Carmina burana, Carmen, King Arthur, Le Lac des cygnes… Aucun ne résiste au talent et à l’humour décapant – et décadent – des artistes du plus célèbre cabaret drag de Paris. Ils nous amènent d’une leçon de chant avec des apprenties cantatrices à une version électrique de Satisfaction au violon, des confidences du pianiste accompagnateur à un solo sur pointes, du franc éclat de rire à des moments plus émouvants… et toujours avec une grande exigence artistique et le souci de divertir. Après cette soirée, les coulisses de l’opéra n’auront plus de secret pour le « cher public de Mme Arthur ».
Mme Arthur fait son opéra
Du 5 au 19 juillet au Rouge-gorge, 10bis place de l’Amirande

Madame Arthur fait son opéra © N. Selighini
De Loin Si Près de Bruno Pradet
Une tribu. C’est l’image que donnent les huit danseurs masqués de rubans colorés lorsque le rideau se lève. Frappant dans leurs mains puis se déplaçant vers le public, de face, en effacé, ils semblent se livrer à un rituel. Les masques tombent. La danse est énergique, presque martiale, le groupe est soudé, alternant des ensembles rigoureux et des transes libératrices, un travail sur l’attraction entre les corps et quelques solos monologues. Bruno Pradet a souhaité explorer ici l’art brut, cette expression esthétique détachée de toutes les conventions. Les rubans colorés présents sur les murs de la scène prennent alors toute leur dimension et deviennent éléments à part entière de la pièce. Servant d’abord pour former comme un mausolée, ils vont être utilisés ensuite par les danseurs pour créer une œuvre originale, sorte d’immense résille multicolore. Dans De Loin Si Près, mouvements et couleurs se répondent pour constituer une œuvre d’art totale et éphémère.
De Loin Si Près de Bruno Pradet, compagnie Vilcanota
Du 10 au 20 juillet aux Hivernales, 18 rue Guillaume Puy

De Loin Si Près © A Scherer
Stéphanie Nègre
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