Avignon 2025 avec “Fusées”, l’embarquement immédiat
© Jean-Louis Fernandez
Une heure de décollage poétique, porté par trois éblouissants comédiens, chanteurs et acrobates, avec une pianiste qui joue, le bras en écharpe, Schumann et Rossini. Tel est le délicieux spectacle tout public élaboré par Jeanne Candel, avec les artistes de sa compagnie La vie brève. Un voyage lyrique, poétique et drôle, qui parle d’écologie et de voyages, de renaissance et de chaos, mais qui nous ramène surtout à notre finitude mélancolique d’êtres humains.
Le théâtre comme un jeu d’enfant
Autant prévenir, il n’y aura ni vidéo, ni sonorisation, ni effets spéciaux dans ce court spectacle qui se savoure comme un bain de jouvence. Car pour Jeanne Candel, la patronne du Théâtre de l’Aquarium à la Cartoucherie de Paris, le théâtre doit se pratiquer avec des outils rudimentaires, la narration s’effectuant comme un voyage dont la partition musicale, classique et somptueuse, agit comme un fil conducteur. Les spectateurs s’installent, et des acteurs cabossés, enrubannés de bande chirurgicale, le bras ou la tête en écharpe, envahissent le plateau. On jette des planches, on construit un drôle de castelet mobile, le piano traverse le plateau noir en diagonale, et la pianiste Claudine Simon, malgré ses bandages, déploie son talent de concertiste sur des études de Schumann. Où sommes-nous ? Dans un monde qui a déjà explosé ? Après le Big-Bang ? Tiens, Vladislas Galard (Boris) et Jan Peters (Kyril) construisent une drôle de machine pour explorer le ciel. Ils sont vêtus de combinaison en tech bleu, agissent comme des gamins insolents, brouillons et inconscients, en observant une toile de la Renaissance où ils se regardent vivre au milieu des pommiers.
De Léonard de Vinci à l’IA générative

©Jean-Louis Fernandez
Puis, Sarah Le Picard, la narratrice et future IA surpuissante nommée Viviane, nous conte le fil de cette histoire. Imperturbable dans son pantalon bleu métal, elle nous raconte les débuts de notre monde, des animaux que nous fûmes au Big Bang, jusqu’à la Renaissance et la volonté inextinguible de tout savoir, de tout connaître. Les machines, le commerce, le train et l’avion, jusqu’aujourd’hui la fusée, qui va envoyer les deux cosmonautes Boris et Kiryl dans l’espace, à l’instar d’Anatoli Artsebarski et Sergeï Krikalev, envoyés en 1991 sur la station orbitale Mir et filmés à l’occasion par quatre caméras. Alors que l’Union Soviétique disparaît, ils passent plusieurs mois dans l’espace dans un isolement qui dilate le temps et l’histoire. Vladislas Galard et Jan Peters, jouant comme des enfants à partir en fusée, sont absolument fabuleux de fantaisie et d’engagement dans cette épopée surréaliste.
Le délire de l’espace

©Jean-Louis Fernandez
Suspendus dans l’espace grâce à leurs corps élastiques, ils s’amusent comme des enfants avec des toiles peintes, des ustensiles de cuisine, ne supportant pas l’immobilité imposée. Ils ruent dans la cabine de pilotage, se disputent, rigolent, font les clowns. Leur composition burlesque et poétique est totalement réjouissante, le clou du spectacle étant l’interview réalisée par une journaliste de l’AFP qui relaie les questions d’enfants à travers l’espace. Le surréalisme, l’absurde est à son comble et nous nageons, avec le plus grand sérieux, en plein délire. Mais le spectacle n’est pas qu’une pochade, musicale et poétique. Il constitue aussi, pour les enfants comme pour les adultes, une formidable bulle de réflexion, de 55 minutes, sur ce que nous sommes, et sur ce que nous voulons, en tant qu’êtres humains qui agissons souvent comme des animaux sauvages à l’assaut de notre planète.
Helène Kuttner
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