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Le théâtre privé fait sa rentrée : une sélection de très bons spectacles

Hélène Kuttner 1 septembre 2025
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© Mathilde Caelicia

Septembre débarque avec sa floraison de créations et de reprises dans les théâtres parisiens. Pour vous aider à faire votre choix, nous avons sélectionné pour vous quelques pépites sur scène qui méritent votre venue. Selon les thèmes, selon vos envies et selon votre humeur, voici notre sélection critique.

La Disparition de Josef Mengele, à la Pépinière Théâtre

© Jean-Philippe Larribe

Le comédien Mikaël Chirinian reprend l’excellent spectacle qu’il a créé lors du festival d’Avignon. Adaptant l’éblouissant livre d’Olivier Guez, il se glisse dans la peau d’un monstre ordinaire, Josef Mengele, le médecin d’Auschwitz, lors de sa fuite en Argentine en 1949. Dans la mise en scène de Benoît Giros, l’enquête avance et dévoile la complexité d’un homme et d’un système que tous protégeaient. Edifiant.

https://www.artistikrezo.com/spectacle/la-disparition-de-josef-mengele-a-la-pepiniere-theatre.html

Le Menteur, au Théâtre de Poche-Montparnasse

© Pascal Gely / Hans Lucas

Au Théâtre de Poche-Montparnasse, Marion Bierry adapte et met en scène une comédie écrite par Corneille en 1644. Elle la fait précéder de « La suite du Menteur », un opus dans lequel l’auteur se parodiait lui-même par une habile mise en abîme. Une équipe de comédiens voltigeurs se prête au jeu de l’illusion théâtrale, avec une maestria impressionnante et en chansons comme dans une opérette : réjouissant.

https://www.artistikrezo.com/spectacle/le-menteur-fait-de-corneille-le-maitre-de-lillusion.html

Dolores, au Théâtre Actuel – La Bruyère

© Frédérique Toulet

C’est une vie hors du commun, celle d’un héros hors-norme qui est nous est racontée dans une mise en scène de Virginie Lemoine très réussie, avec des comédiens, danseurs et musiciens tous formidables. Sylvin Rubinstein naît à Moscou en 1914, en même temps que sa soeur jumelle Maria. Ces deux enfants illégitimes d’un duc russe et d’une danseuse juive quittent Moscou pour Brody, en Pologne, lors de la Révolution russe et des pogroms réguliers. C’est là qu’ils s’adonnent tous deux à un style de danse qui fait fureur dans les années 30, le flamenco. Eblouissant et gémellaire, le duo de jeunes artistes triomphe vite à Varsovie, Londres ou Berlin sous le nom de « Imperio et Dolores » jusqu’à ce que les nazis interdisent et pourchassent les artistes juifs. Le duo décide de retourner en Pologne mais très vite ils sont emprisonnés et emmurés dans le ghetto de Varsovie. 

https://www.artistikrezo.com/agenda/dolores-retour-sur-une-histoire-spectaculaire-au-theatre-actuel-de-la-bruyere.html

Une Heure à t’attendre, au Théâtre de l’Œuvre

© Patrick Carpentier

Deux hommes se retrouvent face à face dans des fauteuils en cuir vieilli d’un petit appartement parisien. Le premier, en jean et blouson décontracté, découvre le logement qu’il a réservé sur la plate-forme Airbnb, surpris de découvrir le second, costume élégant et long manteau taillé sur mesure, installé dans un fauteuil club. Qui est cet homme qui l’attend dans le noir ? Est-ce le propriétaire qui accueille son hôte ? Après des balbutiements, politesse puis piques ironiques d’usage, arrosés de quelques verres de très vieux whisky, les deux hommes s’expliquent, en se révélant tous deux amoureux de la femme qu’ils attendent. Le premier étant son amant, qui a décidé de la quitter ce soir, le second étant son mari, un avocat d’affaires qui accumule les profits, mais ne semble avoir de richesse que sa propre femme. Que vont se dire ces deux garçons, d’abord rivaux, puis complices et acteurs d’une même relation amoureuse ? La pièce de Sylvain Meyniac aborde avec beaucoup d’intelligence et de malice la question de la relation amoureuse, du couple, en disséquant surtout la part de fantasme, de rivalité et de vérité inhérentes toute relation. Pour servir ce dialogue exigeant, aux méandres surprenants, aux retournements de situation captivants, deux fauves, Thierry Frémont (l’amant) et Nicolas Vaude (le mari) déploient la perfection de leur talent d’acteurs, avec une finesse, une écoute et une sincérité remarquables. Delphine de Malherbe les met en scène avec une sobriété parfaite dans un décor de Catherine Bluwal. Le spectacle est épatant de bout en bout.

Le Jeu de l’amour et du hasard, au Théâtre des Mathurins

© Mathilde Caelicia

Frédéric Cherboeuf et les jeunes acteurs du Collectif l’Emeute, une dizaine d’artistes issus du Cours Florent, met en scène l’un des chefs-d’œuvres de Marivaux. Une course poursuite à la recherche de l’amour vrai qui passe par un entrelacement de travestissements qui nous donnent le tournis, avec les corsets des jeunes femmes en moins. Un spectacle effervescent et lumineux portés par des jeunes comédiens survoltés.

https://www.artistikrezo.com/spectacle/le-jeu-de-lamour-et-du-hasard-marivaux-plus-que-petillant-au-lucernaire.html

La Folle journée ou le mariage de Figaro, à la Scala

© @ Louie Salto

Léna Breban, metteuse en scène au grand talent et à l’énergie solaire, a trouvé en Philippe Torreton un Figaro en or, humain et émouvant, sincère et courageux, pour monter la célèbre pièce de Beaumarchais qui résonne aujourd’hui comme un brûlot libertaire, féministe et hautement social. Il est vrai que la pièce est plus souvent montée à l’opéra, avec Les Noces de Figaro de Mozart, qu’au théâtre, où la richesse de l’intrigue, la qualité des répliques et la longueur des fameuses tirades de Figaro, qui mêle la philosophie au pragmatisme, a de quoi faire peur aujourd’hui. Quel bonheur donc de réentendre cette pièce explosive, qui voit un valet, enfant trouvé qui possède déjà mille vies dans sa besace, revendiquer de pouvoir se marier avec Suzanne, la camériste de la Comtesse, alors que cette dernière se voit délaissée par le Comte qui a droit de cuissage, de vie et de mort sur Suzanne, qu’il pense posséder ! Dans ce tourbillon comique qui détaille les injustices criantes d’une société basée sur la domination de la gente noble et masculine, les personnages rivalisent tous avec des tempéraments de feu et une parole cinglante.

Peu importe, à la Scala

© Vahid Amanpour

On connaît le talent de l’auteur et traducteur Marius von Mayenburg, associé depuis une trentaine d’années à la Schaubühne de Berlin, dont le directeur Thomas Ostermeier, mais aussi bon nombre de metteurs en scène français et européens, ont monté les nombreuses pièces. Avec un brio et une acidité terrible, un humour analytique décapant, il aime disséquer les carcans et les rôles sociaux qui nous sont assignés, souvent dans la cellule familiale ou dans le couple. Ici, Simone, qu’interprète magnifiquement Marilyne Fontaine, et Erik, joué par Assane Timbo parfait, se disputent ce qu’il reste de leur relation amoureuse en morceaux. A l’égalité, l’attention réciproque, le dialogue bienveillant, succèdent le ressentiment, la jalousie et la frustration. Cette toute nouvelle pièce, traduite et mise en scène par Robin Ormond, est très bien servie par les deux comédiens qui nous offrent une vision pitoyable et féroce du couple, basé sur des égoïsmes et nourrie par un capitalisme dévastateur, qui exige toujours davantage de chacun de nous. 

Gauguin-Van Gogh, au Lucernaire

© Cedric Tarnopol

Ils se sont aimés comme des frères, se sont admirés comme des fous, et ont cohabité durant deux mois avant de se déchirer comme chien et chat, période tumultueuse qui prendra fin avec l’épisode de l’oreille coupée, dont Vincent Van Gogh a fait un autoportrait célèbre. Nous sommes le 23 décembre 1888 dans la fameuse Maison jaune de Van Gogh, à Arles, celle dont Vincent voulait faire « une maison d’artistes d’avant-garde », de ceux qui casseraient les codes du classicisme et du réalisme. Pour l’heure, Paul Gauguin débarque dans le Sud chez son ami Van Gogh, protégé financièrement par Théo Van Gogh, le frère de Vincent. William Mesguich, Van Gogh, et Alexandre Cattez, Gauguin, sont éblouissants d’engagement et de sincérité dans cette pièce signée et mise en scène par Cliff Paillé et Noémie Alzieu, avec la précieuse complicité à l’écriture de David Haziot. Un voyage émotionnel et pictural d’une formidable intensité. 

Hélène Kuttner

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