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Antoine Navarre : “J’aime que le théâtre ait des idéologies et des messages à faire passer”

Mathilde Navarre 8 décembre 2021
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Rencontre avec la Compagnie La Contemporaine, une compagnie de théâtre jeune et dynamique créée par des élèves de la prestigieuse école des Cours Florent. Installé à Bordeaux, le créateur – et acteur – de cette toute nouvelle compagnie, Antoine Navarre, nous parle ici de ses ambitions.

La Contemporaine, c’est qui ? 

À l’origine, c’est moi qui ai décidé de créer La Contemporaine afin d’avoir une structure pour accueillir la première pièce montée par notre groupe de promo des Cours Florent de Bordeaux. La Contemporaine c’est aussi Charlotte Goutagny, qui met en scène notre première pièce. Il y a également Augustin De Lapeyriere qui s’occupe du design et de notre communication externe, Jeremy Garcia pour l’administratif et Maxence Podvin pour la gestion des dates et la recherche de contrats. En réalité, La Contemporaine c’est tous les comédiens qui en font partie et qui m’ont aidé à gérer les démarches administratives et bien plus encore ! Sans eux, cette compagnie ne serait pas ce qu’elle est. C’est notre compagnie à tous.
Aujourd’hui, Charlotte et moi gérons la compagnie au quotidien, ce qui implique l’organisation en amont des représentations, la communication et la gestion des réseaux sociaux, ainsi que tout le côté administratif. On cherche des dates et des endroits où se produire, on gère l’achat de matériel nécessaire à la création d’une pièce, on démarche des théâtres et on monte des dossiers artistiques pour obtenir des résidences de création. Gérer une compagnie, c’est tout le travail que le spectateur ne voit pas. Je suis très reconnaissant envers Charlotte qui est à mes côtés depuis le début de cette aventure, nous sommes complémentaires dans notre travail. Au-delà de l’équipe fixe, il y a également plusieurs jeunes comédiens présents dans la compagnie, dix pour le moment, tous anciens camarades du Cours Florent.

Antoine Navarre

D’où vient cette volonté de créer une compagnie théâtrale ?

Ça faisait un moment que l’idée de créer une compagnie de théâtre tournait dans mon esprit et finalement, c’est en avril 2021 que La Contemporaine a été créée. Elle nous permet de regrouper plein de projets sous une seule et même structure et d’être reconnu sous un seul nom. C’est la concrétisation d’une passion et de trois années de travail pour se retrouver, nous les acteurs et le public, et partager ce qu’on aime faire. Surtout après cette période de crise qui a obligé le monde entier à briser le lien artistique qui nous liait.

Pouvez-vous nous présenter la pièce que vous produisez en ce moment ?

Oui, il s’agit de la pièce Arlequin valet de deux maîtres, de Carlo Goldoni. C’est notre première production avec La Contemporaine et nous nous sommes produits cet été à l’occasion du festival Les Nuits du Château, à Nieul-lès-Saintes. On a également été élu meilleur collectif par notre école, parmi une vingtaine de projets de fin d’études, ce qui nous permet d’effectuer une tournée des campus des Cours Florent avec notre pièce pour représenter Bordeaux ! On va donc se produire à Paris, Bordeaux, Montpellier et Bruxelles. On projette également de faire une tournée des lycées et des collèges en Gironde cet hiver, et on commence déjà à travailler sur  l’organisation d’une tournée des villages de France pour l’été prochain.

Parlez-nous de la mise en scène d’Arlequin valet de deux maîtres

C’est Charlotte Goutagny qui a mis en scène la pièce et notre première inspiration a été les figures de la commedia dell’arte, dont on s’est imprégnés pour notre jeu. Nous sommes partis d’un travail dirigé par Antoine Basler – qui a été l’un de nos professeurs – sur cette même pièce, afin d’en créer un spectacle entier. Pour aider le public à retenir le rôle et le rang social des personnages que nous interprétons sur scène, notre mise en scène est codifiée par des couleurs : les nobles portent du rouge foncé, les jeunes mariés portent des couleurs pâles et le valet Arlequin porte du orange. Cette mise en scène est moderne et dynamique : on a mêlé la danse et le chant au théâtre, ce qui rend la pièce accessible à un public très large. Tout le monde est en mesure d’en comprendre les enjeux. La particularité de cette mise en scène est que nous avons misé sur un dédoublement du personnage d’Arlequin. Il y a donc deux acteurs dans le même rôle. Cela permet une mise en lumière très nette de sa personnalité, de ses priorités, et ça offre au public un accès direct à ses pensées.

Charlotte Goutagny

Selon quels critères choisissez-vous les pièces que vous interprétez ? La compagnie s’inscrit-elle dans un genre, une époque ?

La Contemporaine s’inscrit dans un genre moderne, jeune et punk, politique et actuel. En créant cette compagnie, j’avais une vraie volonté de faire du théâtre libéré de tous les codes classiques, de sortir de cet héritage et de l’image parfois un peu “vieillotte” que les gens peuvent en avoir. La Contemporaine veut démocratiser le théâtre classique en modernisant des pièces originales. Toutes les pièces classiques traitent de sujets très actuels. Nous, on les rend attractives et modernes. Ce qui nous a plu dans Arlequin par exemple, c’est le traitement social que fait Carlo Goldoni de la femme en 1746. C’est un sujet tellement actuel ! On s’est donc concentrés là-dessus et on peut noter l’évolution du personnage de Clarisse au fil de la pièce. Elle est d’abord contrainte par son père de se marier avec un homme qui a été choisi pour elle, puis nous assistons à son émancipation et finalement, elle se marie avec l’homme qu’elle aime. J’aime que le théâtre ait des idéologies et des messages à faire passer.

Comment la compagnie a-t-elle appréhendé la crise sanitaire ?

On ne l’a pas vraiment sentie parce qu’en avril 2021, date de création de la compagnie, le plus gros de la crise était passé. Puis, notre mise en scène d’Arlequin fait d’elle une pièce d’extérieur. Elle est vouée à être jouée en plein air, donc nous n’avons pas eu trop de problème avec les restrictions et les jauges pour l’accueil du public.

Quels sont vos projets à venir ? Que peut-on vous souhaiter ?

On peut nous souhaiter une programmation au Festival d’Avignon ! On y travaille. Notre prochain projet est d’interpréter la pièce Le Pays lointain, de Jean-Luc Lagarce. Je suis véritablement tombé amoureux de l’histoire, du travail et de l’œuvre de cet auteur.

Le mot de la fin ?

Le travail paie, il faut suivre ses rêves et ne jamais revoir ses ambitions à la baisse sous prétexte de peur ou d’angoisse. Le plus palpitant réside dans le futur.

Plus d’infos sur le compte d’Instagram de La Contemporaine.

Propos recueillis par Mathilde Navarre

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